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[ARMENIE] "Cette nuit nous prierons tous pour ceux qui sont tombés, pour notre unité, la paix et la liberté ". 1/4

« Nous avons traversé une longue nuit, mais ce soir des centaines de petites flammes brillent dans notre église et jusque dans vos maisons. Nous sommes debout. Nous continuerons. De vivre, de croire, d’espérer, d’être fiers. Ici, sur notre terre, et pour l’éternité ».

Dans la cathédrale Sainte-Mère-de-Dieu de la capitale de l’Artsakh, de dos et entouré de ses six diacres, le père Terminas répète d’une voix claire qu’il faut résister. Depuis 16 heures cet après-midi, tous les habitants de la ville, « ceux d’avant » et « ceux de maintenant », résidents historiques ou déplacés de Chouchi, d’Hadrout ou de Martouni, défilent dans les transepts pour allumer les bougies qu’ils rapporteront chez eux. C’est la tradition chez les apostoliques arméniens: le soir de Noël, ils ramènent la lumière de Dieu, une lumière du fond des siècles, dans chacune de leurs maison.

Devant les bougies, des hommes en treillis se recueillent, des enfants couverts comme Saint-Georges cherchent leur mère dans la foret des jambes tandis que la chorale entame le « Der voghormia » (« seigneur prend pitié ») en polyphonie. « On peut célébrer la naissance de Jésus et allumer des cierges même après un désastre » me confie une vieille femme au sourire immense. C’est le premier Noël depuis la fin de la guerre, et « c’est une messe de vivants célébrée pour nos morts » me répète ce jeune soldat en quittant la cathédrale. En sortant de dessous son épais blouson militaire une croix bricolée avec deux bâtons irréguliers et un morceau de barbelé, il est heureux de me dire que même aux heures les plus dure, elle ne l’a jamais quittée. « Si je suis là, c’est parce que ma croix m’a sauvé. Cette nuit nous prierons tous pour ceux qui sont tombés, pour notre unité, la paix et la liberté ».

Marine de Tilly