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Chrétiens d'Orient : «Une population traumatisée par son épuration en Irak»

L’Œuvre d’Orient, dirigée par Mgr Pascal Gollnisch, est l’association française la plus mobilisée par la crise affectant les chrétiens en Irak parce qu’elle est celle qui les connaît le mieux. Elle finance depuis des décennies une multitude de projets religieux, éducatifs, sociaux et médicaux pour tous les chrétiens du Proche-Orient. Celui qui a organisé cet été le voyage en Irak du cardinal Barbarin a été consulté à de multiples reprises par les autorités françaises sur ce dossier. Il livre son expertise au Figaro.

Le Figaro : L’Islam de France se mobilise mardi pour lancer à son tour une campagne de sensibilisation alors que beaucoup s’inquiètent de voir des jeunes Français partir en jihad. Comment agir concrètement sur ce plan.

Mgr Pascal Gollnisch –  L’Œuvre d’Orient s’inquiète effectivement de la situation créée par les Français qui ont cru devoir apporter leur aide au « califat de la haine ». L’Église catholique de France, en lien avec les autorités ecclésiales d’Irak et de Syrie, poursuit donc son action de proximité, de communion spirituelle, d’écoute et d’accompagnement des différentes initiatives mises en œuvre en Orient ou en France pour venir en aide aux minorités orientales. Mais aujourd’hui, la responsabilité principale incombe aux États, à l’Union Européenne, aux États de la région et aux Nations Unies.

De quelle responsabilité parlez vous ?

En tout état de cause, une enquête internationale est indispensable pour savoir qui a aidé ce califat terroriste. Il est non moins nécessaire que les autorités irakiennes mettent en œuvre les moyens pour construire un Irak qui serve l’unité nationale.

Vous êtes en contact quotidien avec les chrétiens d’Irak. Quelle est la situation concrète des réfugiés à ce jour ?

Les chrétiens sont traumatisés, réduits à errer dans les rues, beaucoup songent à quitter l’Irak. Est-ce vraiment une solution pour 400 000 chrétiens qui vivent en Irak !

Cette population est traumatisée par les conditions de son épuration. Tous leurs biens ont été confisqués comme cela l’a été pour les autres minorités telles les Yézidis, les Turcomans, et d’autres encore.

 

S Ouzounoff/CIRIC
S Ouzounoff/CIRIC

Voyez vous une solution pour eux ?

Trois questions se posent:

  • d’une part, l’assistance humanitaire face à une crise majeure. Des familles sont à la rue, traumatisées et dans le dénuement.
  • d’autre part, certaines familles souhaitent quitter l’Irak et appellent de notre part une réponse adaptée.
  • Enfin, il importe de neutraliser leurs adversaires, qui ne sont en rien un État islamique. Ni un État car aucune composante moderne d’un État ne les constitue, ni islamique car ils ont été condamnés par toutes les autorités musulmanes sunnites en France et à l’étranger.

Faut-il intervenir militairement ?

Nous sommes en réalité face à un groupe terroriste qui nécessite l’usage de la force appropriée contre tout groupe terroriste. Cette action suppose l’armement des militaires kurdes, les peshmergas ; l’action du gouvernement de Bagdad ; l’action internationale selon les dispositions du Conseil de sécurité. Cela suppose également l’action des forces sunnites. Enfin, la question se pose de forces de police d’auto-défense pour les chrétiens.

A quel degré sommes nous sur le plan humanitaire dans la résolution de cette crise ?

L’aide humanitaire se met en place sous l’impulsion de la France à travers l’Union Européenne et le Haut-Commissariat aux réfugiés de l’ONU. La seule solution durable est celle qui consisterait à sécuriser les villes et villages chrétiens pour permettre d’envisager le retour des populations chez elles.

Aide humanitaire, action militaire ponctuelle, est-ce que ces perspectives touchent vraiment le cœur du problème ?

Pour ce qui est de l’aide internationale, les associations sauront apporter une aide significative, en particulier dans le domaine de l’éducation et de la santé. Mais, cela ne servirait à rien si la question n’est pas résolue en Syrie elle-même.

La France vous parait elle suffisamment mobilisée ?

La classe politique française a su manifester sa proximité et sa solidarité. Mais le « califat de la haine » comme l’a nommé Monsieur Fabius est un danger pour l’ensemble de la région et, à terme, pour l’Europe elle-même.

Propos recueillis par Jean-Marie Guénois pour Le Figaro


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