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"De retour à Alep" la lettre de Mgr Jeanbart

Ces activités au service des chrétiens d’Alep, avaient été annoncés il y a quelques mois, à l’issue de la libération de la ville d’Alep. La ville a pu en effet retrouver depuis, un peu de calme et un minimum de sécurité. Veuillez donc trouver ci-dessous un rapport succinct à ce sujet que je présente avec reconnaissance à tous ceux qui s’intéressent à nous.

 

Bien chers amis,

De retour à Alep à la fin du Synode et après avoir terminé ma mission d’Administrateur de notre Église Melkite sur la demande du Saint Père, suite à son acceptation de la démission du Patriarche Grégoire, je reviens à vous pour vous donner quelques nouvelles du diocèse au bout d’une absence qui m’avait éloigné de mes bien-aimés fidèles deux mois durant.

Je dois reconnaître tout d’abord, que l’accueil chaleureux de mes collaborateurs, qui s’impatientaient de me retrouver, m’a donné plein de réconfort, autant que mon retour souhaité par un grand nombre de chrétiens de la ville, qui avaient, semble-t-il, beaucoup prié pour que je puisse rester avec eux ! Si cela m’a touché profondément, il serait inutile de parler de l’attachement grandissant qu’il a pu animer en moi a leur égard. Je trouve qu’il y a là de quoi augmenter encore plus ma volonté de m’adonner entièrement  et avec enthousiasme à leur service.

Grâce à Dieu, mon Vicaire Général avait bien fait son travail, aidé par notre clergé dévoué à la tâche, ne laissant rien manquer à nos chers fidèles. Les directeurs de nos institutions diocésaines autant que les responsables de nos différents projets en cours ont été à la hauteur de leurs charges. Voyant tout ce que j’ai pu trouver autour de moi à mon retour et constatant que les projets initiés se développaient d’une façon remarquable, je me suis mis à remercier le Seigneur. Ce fut pour moi l’occasion de penser à la parabole du grain de sénevé, qui une fois mis dans la terre prenait tranquillement sa mesure et grandissait pour devenir, à l’insu de celui qui l’avait planté, un arbre où plein d’oiseaux pouvaient prendre refuge!

De fait, j’ai eu la joie de voir notre Centre de Formation Professionnelle prendre sa mesure et avoir assez d’animation pour ressembler à une ruche d’abeilles en activité continuelle. Le nombre d’élèves en formation dans les différentes branches de cet institut n’a fait qu’augmenter, ce qui nous donne l’espoir de voir nos jeunes trouver facilement des emplois satisfaisants dans les mois qui viennent, pour ne pas dire les semaines et même les jours!

Notre Centre Médical a pris beaucoup d’ampleur, il offre actuellement à des centaines de patients des auscultations médicales gratuites dans douze spécialisations, y compris l’art dentaire qui a permis des soins à un coût dérisoire à des dizaines de patients chaque semaine. Cette petite Polyclinique commence à avoir beaucoup de succès pour la qualité de ses services, de sa propreté et de son accueil, aussi bien auprès des médecins de la ville qu’auprès des patients eux-même!

Nos équipes qui s’occupent de l’aide humanitaire diversifiée que nous donnons, continuent leurs services d’une façon régulière, pour que les moins fortunés puissent être secourus sans avoir à quémander la part qui leur est assignée. Les familles, les anciens, les élèves des écoles, les jeunes foyers avec leurs nouveaux nés et les malades sont tous bien servis et aidés sans arrêt ni aucun retard.

Le Centre d’achat établi sans but lucratif il y a juste quelques mois, fonctionne remarquablement bien! Il a pu remplacer la distribution des paniers alimentaires d’une façon très satisfaisante. Chaque famille, munie d’un bon d’achat équivalent au coût du panier préconisé, peut désormais choisir les produits et provisions dont elle a vraiment besoin et à des prix de faveurs. En plus de ce service rendu à la distribution, le Centre a pu donner un emploi à une dizaine de personnes au chômage.

Nos écoles ont donné de très bons résultats aux examens officiels, elles sont en tête des institutions scolaires. Dans l’Ecole Amal, trois de nos élèves du brevet ont été classés en tête de liste, parmi les six premiers de la ville d’Alep, il y a de quoi être vraiment fiers de nos établissements scolaires et rassurés de leur bon fonctionnement! Les nombreuses subventions scolaires que nous octroyons chaque année à nos élèves nous paraissent bien placées. Nous tenons à ce que la guerre ne nous empêche pas d’améliorer la qualité de notre enseignement.

Pour relever le niveau de la connaissance des langues étrangères, nous avons lancé pendant les vacances estives, des cours intensifs de langues. A cette date 124 de nos élèves y sont inscrits et viennent en matinées les avant-midis, suivre régulièrement les cours de français et d’anglais avec enthousiasme et assiduité. En plus des langues un cours d’éducation civique et de politesse leur est offert une fois la semaine, et en langue française, s’il vous plait! Les élèves sont ravis d’apprendre des chansons en langues étrangères en préparation de la célébration de fin de session en présence de leurs parents.

De nombreux camps d’été et colonies de vacances, subventionnés par l’Archevêché, sont en cours. Ils permettent  à nos jeunes de sortir, de socialiser et de respirer un peu d’air frais en montagne et loin du tumulte de la ville, dans laquelle ils ont été enfermés pendant très longtemps. Dans ce but,nous faisons beaucoup d’efforts pour arriver à restaurer et réaménager notre Centre de camping et de colonies de vacances, situé près de la côte en pleine montagne. Ce centre a une capacité d’accueil pour des groupes de jeunes pouvant atteindre jusqu’à 150 personnes.

« Bâtir pour Rester » continue son action sociale et de développement. Plus de 500 appartements de la ville, atteints par les bombardements, ont déjà été restaurés. 98 prêts gratuits ont été alloués pour aider nos pères de familles soit à relancer un petit commerce en peine ou à en lancer un nouveau. En plus du soutien donné au fonctionnement des cours de formation professionnelle, le Mouvement a lancé un Centre socio-culturel pour la promotion féminine, dont les travaux d’aménagement viennent d’être terminés, il sera inauguré dans les semaines qui viennent. « Bâtir pour Rester », qui dès à présent a pris pas mal d’envergure, sera appelé une fois la guerre terminée à élargir sensiblement son champ d’action, pour participer à la reconstruction des institutions les plus indispensables pour une vie moins dure et plus décente pour nos chers fidèles, que la guerre a tristement dépossédés.

Une autre lueur d’espoir nous vient du fait de la libération d’Alep des rebelles. La ville retrouve un peu plus de sécurité dans la majorité des quartiers chrétiens. Nous avons donc pu commencer les travaux de restauration des structures ecclésiales les moins atteintes, ce qui nous a permis de donner du travail à une centaine, entre ingénieurs, ouvriers et manœuvres. Cela donne la possibilité de redonner confiance au gens autour de nous. Les ouvriers voient leur chance de trouver du travail augmenter et les entrepreneurs leurs investissements préconisés, utiles et tout à fait possibles.

Enfin à notre appel : »Alep vous attend », le bureau en charge a reçu un bon nombre de demandes au retour ! Vous comprenez que cela ait pu nous réchauffer le cœur et nous donner plein d’espoir. Si ce mouvement de retour va de l’avant et se concrétise, nous pouvons espérer que l’hémorragie qui nous menace puisse s’arrêter, pour nous laisser vivre dans notre cher pays. Nous continuerons à agir dans ce sens aidés par tous ceux qui nous veulent du bien et veulent nous aider à rester chez nous !

 

 

Alep 1 juillet 2017.                                                              +Jean-Clément JEANBART

Archevêque d’Alep