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[ÉTHIOPIE] Le témoignage de Simon : "Leur mission ici est de donner des soins gratuitement aux personnes qui en ont besoin "

Découvrez le témoignage de Simon, volontaire en Ethiopie auprès des Frères de Saint jean.


Chers amis, chère famille,

Nous sommes dix, au prieuré: 6 frères de Saint Jean dont 3 prêtres, Mebratu un jeune Éthiopien en année de discernement pour rentrer chez les frères, Deo-Gratias une volontaire togolaise, Ronan un Français envoyé comme moi par l’Oeuvre d’Orient et moi. Il y a également 3 gardiens qui se relaient et Tafessètch notre cuisinière.

Je rencontre beaucoup de personnes d’origines différentes ! Si l’on m’avait dit que je goûterais des cupcakes américains pour la première fois en Ethiopie, j’aurais rigolé… et pourtant ! Ils étaient préparés par la fille d’un diplomate américain et étaient délicieux.
Pendant le week-end, des Éthiopiens de mon âge viennent au prieuré, ils suivent toute l’année une “école de vie”. Je suis très content de pouvoir leur parler, on rigole bien avec eux !

J’apprends à jongler entre les langues:
Les frères de Saint Jean parlent tous français, Mebratu parle amharique et anglais, les Éthiopiens de “school of life” parlent un peu anglais mais plutôt amharique. Il y a aussi 2 Éthiopiens qui viennent parfois aider qui ont appris le français… bref, on a un beau mélange de ces 3 langues.
Le plus amusant c’est qu’il nous arrive de parler anglais alors qu’il n’y a dans la discussion que des personnes qui parlent plus facilement français. J’apprends l’amharique aussi rapidement que je le peux en écoutant les conversations, en demandant du vocabulaire et en lisant un peu des cours. Avec les chiffres, quelques mots-clés et le non-verbal, j’arrive parfois à comprendre une discussion dans son contexte.
Il faut tout faire en phonétique puisque je ne peux pas m’appuyer sur l’alphabet qui est différent mais je commence à comprendre la formation des phrases !

Pour les frères, j’ai beaucoup fait de l’administratif les premières semaines, ce n’est pas le plus passionnant… mais c’est ce qui les aide ! Rapport de comptabilité, montage de dossier pour demander des subventions…

Nous avons maintenant un premier camp d’enfants de 12 à 16 ans. Ils sont une trentaine ici pour la semaine. Le thème du camp : “Nous marchons dans la lumière du Seigneur” alors nous préparons avec eux une pièce de théâtre sur l’Exode du peuple d’Israël et une autre sur les disciples d’Emmaüs. Les enfants sont très amusants et j’arrive à bien rigoler avec eux en utilisant mes quelques mots et des gestes. C’est une autre histoire quand il faut les coucher et réclamer le silence dans les dortoirs, ça devient plus compliqué avec la barrière de la langue.

J’ai eu l’occasion de faire une semaine à Awassa en début de séjour avec les sœurs de mères Teresa. Elle fût riche en découvertes et très formatrice, j’ai donc à cœur de vous en parler.
Je ne m’en suis pas rendu compte en arrivant à Addis-Abeba mais la vie dans la capitale n’a rien à voir avec le reste du pays ! Tout comme en France, la vie à Paris est différente mais je n’y avais pas pensé… je l’ai réalisé pendant cette semaine et cela m’a aussi marqué plus tard à chaque fois que j’ai eu l’occasion de sortir de la capitale.
Dès que l’on quitte la capitale, le nombre de voitures diminue, elles sont petit à petit remplacées par les nombreux bajaj, ces petits tricycles motorisés venus d’Asie. Hors d’Addis, ce sont les seuls taxis que l’on peut trouver. Il y en a énormément ! On peut être sûr qu’en en interpellant un, un autre s’arrêtera.

Leur mission ici est de donner des soins gratuitement aux personnes qui en ont besoin. A Awassa, il n’y a “que” 5 sœurs mais le travail réalisé est énorme puisqu’il y a beaucoup de personnes qui travaillent avec elles sur le centre. C’est une vraie petite ruche où chacun a ses activités.

Il y a deux bâtiments principaux où dorment les malades, celui des hommes et celui des femmes et des petits enfants. J’ai été impressionné par le fonctionnement du centre, un maximum de patients sont soignés avec les moyens disponibles. On utilise beaucoup de matières premières que l’on transforme. Tous les draps et écharpes sont ainsi fabriqués sur place avec des métiers à tisser eux-mêmes faits de bouts de bois. Il suffit d’acheter le fil ! On achète aussi des sacs de grains bruts, ils seront triés patiemment à la main avant de passer au broyage pour faire de la farine qui servira à faire les injera.
Les patients qui attendent la cicatrisation d’une plaie par exemple et qui se portent bien peuvent aider aux métiers à tisser.
Les femmes s’occupent de la lessive et du tri des grains. Il y a de la main d’œuvre puisque toute une partie des femmes bien portantes sont accueillies car elles sont enceintes.

J’étais admiratif des cuisinières qui faisaient chaque jour à manger pour 200 personnes sur des fourneaux au feu de bois, dans l’obscurité (hé oui ! la pièce n’a qu’une petite fenêtre et avec tout le bois brûlé, les murs sont noirs !)
Tous les midis, c’était injera au menu ! J’avais la chance de pouvoir varier les repas du soir.

Il n’y a pas de place particulière prévue pour les volontaires chez les sœurs puisque l’accueil des malades ne va pas patienter lorsque nous ne serons plus là. Je me suis donc fait ma place, en proposant mon aide, en regardant puis en demandant à faire… Une semaine c’est court ! En partant j’avais le sentiment d’avoir vu et fait tellement de choses…mais aussi qu’il y en avait tellement plus à voir si je pouvais rester plus longtemps !

Chaque jour, de nombreuses personnes attendent devant le portail. De temps en temps, nous sortons pour donner des médicaments à ceux qui en ont besoin ou faire rentrer ceux dont l’état plus grave nécessite de les garder pour plusieurs jours ou semaines. Le dispensaire des sœurs est connu, ils viennent parfois de loin pour pouvoir être soignés.

Ce sont les personnes les plus pauvres qui viennent et parmi les plus pauvres, celles qui ont les pires blessures ou maladies. En faisant le tri à la porte avec l’infirmier, je découvre toutes sortes de parasites et maladies. C’est l’application concrète de toutes les fois où j’ai révisé avec des amis en médecine et parlé de leurs cours de parasitologie.

Un gros travail consiste à panser les plaies. Ce n’est pas compliqué et on m’a rapidement demandé de le faire seul. Les plaies ne sont pas belles, elles sont profondes, larges et mal fermées… J’avoue qu’en arrivant, j’ai eu un peu de mal à voir ça, il faut globalement avoir le cœur bien accroché. Je suis étonné de la vitesse à laquelle je m’y suis habitué ! Deux jours après, je regardais les plaies de près pour bien les nettoyer. Avec un infirmier, je passais dans les chambres pour donner les médicaments en perfusion aux malades. J’ai vite appris. Il prenait le temps de tout m’expliquer avec des gestes et des mots d’anglais. On m’a presque proposé de poser une perfusion après avoir regardé 3 fois !

Beaucoup de femmes enceintes sont accueillies dans le bâtiment des femmes. Sans cela, elles n’auraient pas d’endroit où dormir ni de quoi se nourrir. Le plus grand risque est que la maman abandonne son enfant tant la situation dans laquelle elle est compliquée. Pour éviter cela, les sœurs gardent la maman pendant 3 mois après l’accouchement à l’hôpital, afin qu’elle puisse s’attacher à son enfant dans un cadre paisible.

J’ai eu l’occasion de visiter des familles chez elles. Après 30 minutes de piste et plusieurs arrêts pour trouver la bonne route (nous avions seulement le nom du père de famille pour réussir à se faire indiquer le chemin), nous arrivons dans des maisons traditionnelles. Ce n’est pas souvent qu’une voiture vient jusqu’ici alors forcément, nous étions l’animation du voisinage. Les enfants pieds-nus présentent souvent des signes de malnutrition. Nous sommes finalement repartis avec la mère dont l’état de santé ne cessait de s’aggraver…
Je n’ai jamais sérieusement pensé à faire des études de médecine… et pourtant ici, je dois dire que ça prendrait beaucoup de sens ! Je préfèrerais passer 10 ans à apprendre sur le tas ici que sur les bancs de nos universités.

Comme les sœurs vivent en communauté, nous ne les voyions pas beaucoup, seulement durant la messe et l’heure d’adoration. Ou bien dans la journée pour les différents travaux à faire mais elles sont bien occupées ! J’aurais aimé avoir un peu plus de temps pour leur poser des questions.

J’ai eu une messe en amharique (rite romain) à Awassa pour la première fois. J’ai été impressionné de voir que même si je ne comprends presque que le mot “Saint Esprit” de tout ce qui est dit, j’arrivais à savoir exactement ce que nous faisions et nous où en étions dans la messe. Je rends grâce pour ce côté universel de l’Eglise catholique..

Simon