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Gregorios III : Plus que jamais, nous avons besoin d’une vision d’avenir arabe islamo-chrétienne

Un cri d’alarme et un appel pressant à la prière telle peut se résumer la lettre de Pâques de Sa Béatitude Gregorios III, patriarche d’Antioche et de tout l’Orient, d’Alexandrie et de Jérusalem des Grecs-Melkites Catholiques.

Le Chemin de Croix du Monde arabe vers la résurrection?

Sous un titre évocateur, « Le Chemin de Croix du Monde arabe vers la résurrection», Gregorios III tente d’analyser « la réalité et les causes » de la révolution arabe. Il commence sa réflexion par un extrait du message du pape Benoit XVI pour la journée de la paix 2009 : « Toute forme de pauvreté non choisie prend racine dans le manque de respect envers la dignité transcendante de la personne humaine. Quand l’homme n’est pas considéré dans l’intégralité de sa vocation et que les exigences d’une véritable écologie humaine ne sont pas respectées, les dynamiques perverses de la pauvreté se déclenchent aussi », avant de la poursuivre avec le mystère de l’Annonciation.

« Quand le Christ a pris un corps exactement comme notre corps, Il a voulu, par là, démontrer la dignité du corps humain et, partant, la dignité de l’homme que Dieu a créé à son image et à sa ressemblance (…) Combien notre monde a besoin de comprendre la dignité du corps et la dignité de Dieu! La dignité de l’homme, comme Dieu l’a respecté et l’a créé, à son image et à sa ressemblance, implique la dignité de sa liberté, de sa valeur, de son développement et de son éducation. Notre monde d’aujourd’hui, le monde arabe en particulier (…) est dans une révolution de la dignité de l’homme, de sa liberté et de sa valeur… [Mais] quand l’homme élimine Dieu… il se met dans le trouble… et fait entrer dans son cœur la jalousie, la dictature, la violence, le terrorisme et le fondamentalisme. Ces choses-là deviennent son programme à la place des commandements de Dieu… »

Poursuivant sa lecture du message de Benoit XVI déjà cité, Gregorios III en prend un autre extrait : « Fidèle à l’invitation de son Seigneur, la Communauté chrétienne ne manquera jamais de donner à la famille humaine tout entière son soutien dans les élans de solidarité créative, non seulement pour donner le superflu mais surtout pour que changent les styles de vie, les modèles de production et de consommation, les structures de pouvoir établies qui régissent aujourd’hui les sociétés. »

Et le patriarche de souligner « Nos Eglises, nos congrégations religieuses doivent continuer leur chemin de foi ecclésiale et nationale, et développer leurs services cultuels, éducatifs, culturels, de santé, de jeunesse, et de service social. Les Eglises doivent participer à la résurrection des pays arabes, et contribuer au projet social, national, politique et économique dans toutes nos patries… Nous devons tous redoubler nos efforts, en partant des propositions et conclusions de l’Assemblée Spéciale pour le Moyen-Orient du Synode des Evêques, tenue à Rome au mois d’octobre 2010. »

Une vision d’avenir islamo-chrétienne

Car, ajoute Gregorios III, « Si les pays arabes n’arrivent pas à résoudre ensemble, d’une seule voix, ces développements tragiques et sanglants, avec sagesse, prudence, sens des responsabilités, ouverture, un vrai plan clair, avec transparence et sincérité ; l’avenir de monde arabe sera très sombre pour nous tous. Aucun pays arabe ne peut être en dehors de l’évolution de cette révolution. Aujourd’hui plus que jamais, plutôt que demain, nous avons besoin d’un sens de l’éveil, de conseils, d’un plan social arabe commun. Aujourd’hui, plus que jamais, nous avons besoin d’une vision d’avenir arabe islamo-chrétienne claire avec de vastes horizons. Sinon, notre monde arabe, avec ses citoyens chrétiens et musulmans et ses diverses confessions, est exposé à la dislocation, à la division ; ce monde arabe serait émietté en petits Etats confessionnels isolés, se combattant les uns les autres et se haïssant les uns les autres. »

La Paix : clé de l’avenir

Quant à la paix « c’est la clef de l’avenir » précise le patriarche qui affirme : « Le monde arabe ne peut réaliser les espoirs des peuples arabes, surtout ceux des jeunes qui demandent la liberté et la démocratie, s’il ne travaille pas avec beaucoup de sérieux, en s’entraidant avec l’Occident, pour réaliser la paix juste, globale et durable en Terre Sainte, en Palestine. Il faut de la force pour vaincre. L’unité ne sera jamais défaite et l’amour ne sera jamais déçu. »

Gregorios III achève sa lettre en lançant l’idée d’un sommet islamo-chrétien qu’il qualifie « de rêve » et à un appel pressant à la prière : « Nous vivons des jours difficiles, nous marchons ensemble, avec nos frères et nos sœurs arabes, sur ce chemin de la croix et de la passion que n’a jamais connu le monde arabe dans son histoire. Nous vous appelons à élever des prières ferventes, … pour tous ceux qui sont tombés, pour les affligés, ceux qui sont endeuillés, les blessés dans les hôpitaux, les refugiés, ceux qui ont fui devant les horreurs de la révolution. (…) Nous prierons surtout pour nos gouvernants, nos souverains, nos présidents et pour tous ceux qui ont des responsabilités dans nos pays, pour l’armée, les agents de sécurité, la police, afin que notre Dieu leur donne la sagesse, la prudence et la sagacité en vue de prendre les mesures convenables dans ces situations tragiques. Nous prierons aussi pour qu’ils répondent aux exigences, aux requêtes, aux espoirs, aux souffrances, aux aspirations et aux besoins de leurs concitoyens, afin qu’ils s’efforcent de mettre sur pied un programme social et politique qui puisse assurer une vie digne à tous les citoyens de leurs pays. »

Le patriarche conclu sa lettre par la prière pour la paix prononcée par le Bienheureux pape Jean-Paul II à Qunaitra dans le Golan syrien lors de sa visite-pèlerinage sur les pas de saint-Paul le 7 mai 2001.

Extraits : « (…) Dieu infiniment bon et miséricordieux, c’est avec des cœurs pleins de reconnaissance que nous Te prions aujourd’hui sur cette terre où Saint Paul un jour a marché. Il a proclamé aux nations cette vérité : Dieu, dans le Christ, a réconcilié le monde avec Lui (cf. 2 Corinthiens 5, 19). Que ta parole résonne dans le cœur de tous les hommes et de toutes les femmes, que Tu appelles à suivre le chemin de la réconciliation et de la paix, et à être miséricordieux comme Tu es miséricordieux. (…) Père, Tu fais jaillir la justice de la terre (cf. Isaïe 45, 8). Nous prions pour les responsables civils de cette région afin qu’ils s’efforcent de satisfaire les aspirations légitimes de leurs peuples, et qu’ils éduquent les jeunes dans le sens de la justice et de la paix. Fais qu’ils travaillent généreusement pour le bien commun, qu’ils respectent la dignité inaliénable de toute personne et les droits fondamentaux qui trouvent leur origine dans l’image et dans la ressemblance du Créateur imprimées en tout être humain. Nous Te prions particulièrement pour les dirigeants de cette noble terre de Syrie. Accorde-leur sagesse, clairvoyance et persévérance, qu’ils ne se laissent jamais aller au découragement dans leur tâche difficile de construire la paix durable à laquelle leur peuple aspire. (…) »

Ci-joint de très larges extraits de la Lettre de Pâques 2011 de Sa Béatitude Gregorios III et le texte intégral de la prière du bienheureux Jean-Paul II. Le texte intégral de la lettre de Pâques 2011 – en arabe, français et anglais – et disponible dur le site internet du patriarcat : http://www.pgc-lb.org ou sur simple demande.