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L'attitude et la parole du Pape sont des boussoles qui éclairent notre chemin.

La guerre froide représentait après la seconde guerre mondiale une angoisse née du danger d’une guerre mondiale, nucléaire, destructrice de la planète.

On a un peu oublié les bombardiers tournant en permanence dans l’attente d’un ordre éventuel. Cette situation de terreur permettait cependant une certaine sécurité car les superpuissances exerçaient un rôle de gendarme. La chute, tant espérée de l’union soviétique a rendu possible, et en un certain sens ingérable, des conflits régionaux. La mondialisation, et donc l’internationalisation croissante de l’économie, l’émergence de grands pays en voie de développement et devenant des puissances mondiales ont libéré des forces de violence devenues difficiles à maîtriser, avec un marché des armes incontrôlables. Les États-Unis, en un sens livrés à eux-mêmes, ont multiplié  les maladresses, tandis que le géant était blessé et humilié par le 11 septembre. La violence s’est déchaînée dans des cadres aussi divers que l’ancienne Yougoslavie, Israël et la Palestine, les mondes arabophone musulmans et Indo musulmans, l’Afrique et bien d’autres régions. Nos banlieues n’échappent pas à cette spirale de violence dans laquelle l’économie et ses soubresauts ont une part importante.

Violences humaines!

La liturgie qui prépare à la fête du Christ-Roi, comme celle de l’avent qui prépare à Noël, nous rappelle la force de la violence dans ce monde. Et les maîtres de la violence n’hésitent pas à se servir de la religion pour l’instrumentaliser au service de leurs rêves de domination. Chaque religion risque aujourd’hui cette récupération. Dans son histoire, le christianisme n’a pas toujours pu s’en préserver. Mais aujourd’hui l’Église catholique fait retentir partout dans le monde les paroles du Christ invitant ses disciples à devenir des artisans de paix. La parole constante des très grands papes que le Seigneur a donné à l’Église au vingtième siècle est d’une grande force morale et spirituelle, Chacun peut se souvenir de Paul VI a l’ONU, de Jean Paul II à Jérusalem ou de Benoît XVI à Beyrouth. Et  nous avons tous entendu l’appel vibrant du Pape François pour la paix en Syrie. Il est donc très injuste de prétendre que les religions sont à la source des antagonismes dans le monde, car l’Église catholique est totalement exempte de cette accusation, qui de toute façon ferait mieux de viser les politiques qui se servent des religions. Le catholicisme a pu s’en préserver.

Pas l’Islam.

Il faut bien le reconnaître, même si ce n’est pas très politiquement correct. Mais il faut creuser les mécanismes de cette récupération.

D’une part, nous constatons la fragilité institutionnelle de l’Islam sunnite. Cela conduit à la difficulté d’avoir un interlocuteur crédible et reconnu pour nouer un dialogue.

D’autre part se posent des questions théologiques : il faut absolument approfondir les fondements musulmans qui permettent de construire une doctrine musulmane de la paix, de la liberté, de la démocratie. Enfin, il faut distinguer ce qui est authentiquement musulman de ce que sont de simples coutumes sociales souffrant parfois d’un certain archaïsme.  Les chrétiens d’Orient comme ceux d’Occident sont engagés dans cet effort sans faille d’un dialogue respectueux mais exigeant dans la vérité. Seul ce dialogue pourra permettre d’envisager un futur pour les chrétiens en Orient.

Ce contexte s’impose à l’Œuvre d’Orient et exige de nous un discernement délicat dans une situation aussi complexe, discernement  qui doit tenir compte de nos moyens, réels mais mesurés. Force est de reconnaître que je reçois beaucoup de sollicitations pour prendre des positions politiques, ajoutant notre voix aux nombreuses voix qui s’expriment pour le meilleur et parfois pour le pire. Ceux qui me connaissent savent que j’en suis tenté… mais il ne s’agit pas de se faire plaisir.

Le seul critère de notre action doit être celui de l’intérêt des chrétiens d’Orient. Il nous semble donc essentiel de nous situer en Église.

L’attitude et la parole du Pape sont des boussoles qui éclairent notre chemin. L’Œuvre d’Orient est libre. Elle n’est inféodée à aucun gouvernement, à aucun parti, à aucun groupe de pression. Elle tire sa force de la seule confiance de ses donateurs. Elle ne cesse d’être à l’écoute de ses frères d’Orient, elle se réjouit d’avoir la confiance et l’amitié de nombreux évêques d’Orient. Elle ne cesse de faire entendre leurs points de vue sachant que pour y parvenir il faut distinguer ce qui est dit publiquement et ce qui doit être dit discrètement. L’Œuvre d’Orient vit, comme dans sa propre chair, les souffrances de nos frères. Tous les collaborateurs sont saisis par les drames que vit le Moyen-Orient.  Nous ne sommes pas des politiques, nous ne sommes pas des diplomates, nous ne sommes pas de simples organisations humanitaires mais nous travaillons avec tous pour faire progresser en France le souci des chrétiens d’Orient selon les modalités qui nous sont propres.

Éditorial du bulletin 773