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Pour Noël, soutenons les chrétiens d’Orient, avec le magazine La Vie,

Les chrétiens d’Irak s’apprêtent à célébrer Noël. Mais leur calvaire est loin d’être terminé. Chassés par les djihadistes du groupe État islamique (également désigné sous le nom de Daesh) au cours de l’été, des milliers d’entre eux se sont réfugiés dans le Kurdistan irakien. Sur les 135 000 chrétiens déplacés, ils seraient 70 000, démunis de tout, à avoir trouvé refuge à Erbil (1,5 million d’habitants).

Cet afflux de population venue des deux principales villes chrétiennes de la région, Qaraqosh et Mossoul, a créé des besoins. À Ankawa, le quartier chrétien d’Erbil, six écoles servent d’abri à ces milliers de familles en errance. Les élèves qui les occupaient n’ont donc plus de lieu pour étudier.

Pour permettre à ces jeunes de reprendre une scolarité interrompue et pour accueillir les centaines d’enfants qui se retrouvent ici avec leurs familles, dans un dénuement total, des religieuses chaldéennes ont décidé de construire une nouvelle école. Ces sœurs irakiennes – la congrégation des Filles du Sacré-Cœur de Jésus – animent déjà un jardin d’enfants et un centre éducatif.

Elles souhaitent maintenant ouvrir une école primaire de 18 classes qui pourrait recevoir 900 élèves en deux équipes : 450 enfants le matin et 450 autres l’après-midi. Un projet soutenu par l’Œuvre d’Orient et par son directeur général, Mgr Pascal Gollnisch. L’occasion de faire avec lui un tour d’horizon sur la situation des chrétiens au Moyen-Orient. Entretien.

Vous êtes beaucoup allé en Irak ces derniers mois. Qu’avez-vous constaté sur place ?

Mgr Pascal Gollnisch : J’ai vu des populations entières jetées sur les routes, contraintes de fuir des actes de barbarie. Des dizaines de milliers de personnes dans l’angoisse et dans le dénuement. Les chrétiens ont été obligés d’abandonner leurs maisons, leurs quartiers ou leurs villages. Ils ont tout laissé, fuyant à pied dans le désert, sous une température de 50 ° C. Mais, contrairement à certaines idées reçues, ils n’ont pas été massacrés et, à ma connaissance, aucun d’entre eux ne s’est converti à l’islam. Considérant qu’il s’agit de croyants de la religion du Livre, les fanatiques de Daesh les ont épargnés, après avoir pris soin, bien sûr, de les dépouiller de tous leurs biens, maison, voiture, mais aussi montres, bijoux et autres objets personnels. Ils seraient 135 000 chrétiens à avoir vécu un tel exode. À côté des chrétiens de Mossoul et de Qaraqosh, la minorité yezidi a subi un véritable calvaire. Des centaines de familles ont été capturées pour servir d’esclaves ou de boucliers humains. Les autres minorités, des Kurdes, des Turkmènes, mais aussi les musulmans chiites ou sunnites opposés à Daesh ont été purement et simplement massacrés. Certains ont payé de leur vie le fait d’avoir voulu aider leurs frères chrétiens. Il faut leur rendre hommage.

Beaucoup de chrétiens d’Irak ont pris le chemin de l’exil. Faut-il les y encourager ?

PG : Entre 300 000 et 500 000 chrétiens vivent encore en Irak. Nous devons être à leurs côtés. Leur disparition serait une catastrophe. Ces Églises historiques, qui étaient là bien avant l’islam, sont les héritières directes des premières communautés chrétiennes. Elles existent depuis la Pentecôte. Ce sont des Églises sémitiques, qui ont échappé à l’influence grecque et à l’influence latine, très proches de ce qu’a connu le Christ. Mais leur élimination serait aussi un drame pour cette région où règne une grande diversité culturelle et religieuse. Sans les chrétiens, toutes les autres minorités seraient encore plus menacées.

Défendre les chrétiens d’Orient, est-ce une manière de défendre l’Occident ?

PG : Nous ne devons pas faire des chrétiens d’Orient les alliés de l’Occident. Il ne s’agit en rien d’une croisade ou d’une guerre de civilisation. D’ailleurs, ces chrétiens ne doivent rien à l’Europe. C’est plutôt nous qui leur devons tout. Il faut être ferme sur les principes. Au nom des droits de l’homme, qui constituent la charte de l’Onu, nous devons défendre et promouvoir la liberté religieuse. Notamment en Turquie, où l’Église catholique n’a toujours pas de statut juridique, en Arabie saoudite, où la liberté de culte n’existe pas, et dans beaucoup de pays du Moyen-Orient, où la liberté de professer sa foi ou de changer de religion n’est pas assurée.

Comment pouvons-nous aider les chrétiens du Moyen-Orient ?

PG : Les chrétiens d’Orient, et les catholiques en particulier, ne perçoivent l’aide d’aucun État, d’aucune puissance. Le soutien financier que nous pouvons leur apporter est donc capital. En effet, tandis que les communautés sunnites sont soutenues par le Qatar et ­l’Arabie saoudite, les communautés chiites par l’Iran, les communautés orthodoxes par la Russie, et les protestants par des institutions anglo-saxonnes, les catholiques orientaux, eux, ne sont soutenus par aucune organisation internationale. Les appuyer matériellement, c’est aussi manifester notre désir de communion.

Quel rôle peuvent encore jouer les chrétiens du Moyen-Orient ?

PG : Ils n’ont aucun pouvoir politique ou militaire, mais ils ont une formidable capacité de médiation. De leur faiblesse, ils tirent une force, une nouvelle chance d’accomplir leur mission. Tout le monde sait que les chrétiens, par leurs écoles et par leurs dispensaires, sont au service de l’ensemble de la population. Dans tous ces pays, ils sont aux côtés de leurs concitoyens pour travailler au développement et à la paix. Il y a des musulmans en Irak, plus qu’on ne l’imagine, qui veulent construire un État moderne et ouvert sur le monde. Les dominicains de Bagdad sont en train d’ouvrir une académie de sciences humaines pour faire travailler côte à côte des chercheurs chrétiens et musulmans. Pour, disent-ils, et je trouve l’expression très forte, « reconstruire ensemble l’âme de l’homme irakien ». Donc il ne faut pas imaginer un conflit entre deux corps homogènes, avec les musulmans d’un côté et les chrétiens de l’autre. Il y a, en Irak comme ailleurs, des hommes de bonne volonté qui refusent la guerre, qui ne veulent pas se contenter de tolérer l’autre, mais qui croient en une coexistence active et positive. C’est aussi pour cela, pour éduquer les jeunes générations que les religieuses d’Erbil souhaitent ouvrir une nouvelle école. Elles ont besoin de tout notre soutien.

 

> Pour aider les chrétiens d’Irak

À l’approche des fêtes de fin d’année, La Vie a décidé de soutenir la construction d’une nouvelle école chrétienne à Erbil, dans le Kurdistan irakien. Une école animée par la congrégation des Filles du Sacré-Cœur de Jésus, capable d’accueillir 900 élèves de toutes confessions. Avec l’Œuvre d’Orient, qui appuie ce projet, nous faisons appel à votre générosité. Un de nos journalistes est déjà sur place pour recueillir des témoignages et constater l’étendue des besoins. Un reportage complet paraîtra dans le numéro spécial de la Vie 18 décembre (n° 3616-3617). Mais d’ores et déjà, les enfants d’Erbil comptent sur nous. Pour les aider, vous pouvez donner sur le formulaire de don, en notant dans commentaires 14V10.