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Voile sur le Nil... Des nouvelles de Thibault, volontaire pour l’Œuvre d’Orient au Caire

Nous logeons dans une maison nubienne, sur l’île Eléphantine, en face du jardin botanique de l’île Kitchener. Pour se mettre en jambes, nous commençons par un petit tour en felouque jusqu’au village nubien de l’île Sehel, à quelques encablures en amont du Nil. Ce village n’apporte pas de plus-value à celui de l’île Elephantine. Néanmoins, nous découvrons sur un amas rocheux quelques 200 hiéroglyphes, et la « stèle de la famine », qui attesterait de la véracité de l’histoire de Joseph en Egypte, avec les sept années grasses suivies des sept années maigres. De là, nous avons un peu de hauteur pour contempler la première cataracte et distinguer de loin le vieux barrage d’Assouan, achevé en 1902.

Thé, shisha, dominos. Toujours se méfier de celui qui t’assomme à coups de « my friend, my friend, my friend ». Mais en attendant le dénouement, sachons apprécier le moment.

Le lendemain, nous visitons le « Musée de la Nubie » de l’île Eléphantine, où nous sont présentés dans une maison traditionnelle divers objets du quotidien, quelques photos, des animaux empaillés et des pierres. Le contenu est léger, rien à voir avec le Musée de la Nubie national, mais la performance de notre hôte vaut le détour. Après cela, nous prenons un taxi pour visiter les temples de Kallabchah et de Philae. Les temples étant situés chacun sur une île, il faut négocier ferme le prix de la traversée, à ajouter au prix fixe du billet, ce qui est aussi désagréable qu’insensé. A Kallabchah, sur le lac Nasser, nous avons littéralement toute l’île pour nous. Quant au temple de Philae, au lieu de le visiter pour la troisième fois, je reste avec le chauffeur de taxi. Tous les deux chrétiens, nous sympathisons vite, malgré une communication assez difficile, parlant plus l’arabe que lui l’anglais. Les échanges se poursuivent tant et si bien, que me voilà en train de faire le tour du parking avec sa Peugeot 504, dont le levier de vitesse se manie comme la commande des clignotants (inexistants quant à eux). Puis nous avons un grand repas chez lui. Toute la famille nous est présentée, les voisins aussi, jusqu’à l’appel vidéo avec le frère en service militaire… une très belle convivialité malgré notre conversation limitée.

Pour notre dernière journée à Assouan, nous nous approprions le temps et l’espace égyptiens. Grimpant sur les hauteurs de la rive occidentale par les Tombes des Nobles, nous contemplons la magnifique vue sur Assouan qui s’offre à nous. Puis nous nous engageons dans le désert doré pour rejoindre le monastère Saint-Syméon. Continuant notre marche, nous dépassons le mausolée de l’Aga Khan, pour rejoindre une mince bande de terrain cultivée le long de la berge. Le décor parfait pour une petite baignade rafraîchissante, arrivée à point nommé ! Nous terminons l’excursion avec un excellent déjeuner dînatoire (c’est une habitude en Egypte) dans un superbe restaurant au cadre très reposant. Pour un excellent repas pour quatre, le patron a la bonne idée de nous présenter la note : 55 euros. Raisonnable me diriez-vous. Mais nous ne sommes pas des touristes, nous lui disons que nous n’avons pas d’euros, que des livres égyptiennes, comme nous habitons et que nous travaillons en Egypte. Il nous dit pas de souci, prend sa calculette, multiplie la somme par 21, et nous demande dans le plus grand des calmes 1155 EGP. Pour votre information, le salaire moyen égyptien serait de 2000 EGP. Mais oui mais oui, allons, un thé à un euro, c’est rien ! Nous tentons de ne pas nous faire avoir par son sophisme. Non non non, le thé n’est pas à un euro, il est à 20 guinées. Et en face de chez moi, le thé est à 5 guinées max. Nous pleurons tant et si bien, que petit à petit, la facture descend à 800. Sûrement toujours trop, mais bon, il est difficile de se défaire de l’étiquette de l’étranger riche.

A l’épreuve du désert pour se rendre au monastère Saint-Syméon.

Le lendemain, enfin c’est le départ en felouque. Trois jours et trois nuits à ne strictement rien faire, que de se laisser tranquillement porter jusqu’à Edfou. A chaque jour suffit son temple : le premier, nous visitons Kom Ombo, le temple dont il ne reste plus grand-chose, si ce n’est la particularité encore visible d’être construit en symétrie, pour rendre un culte égal à deux dieux : Sobek, le dieu crocodile, et Horus, le dieu faucon. Dans le musée des crocodiles, nous avons un mal fou à nous débarrasser du gars qui veut nous faire la visite, alors nous nous ingénions à ne rien comprendre à l’anglais. Il finit par perdre patience.

Le deuxième jour, c’est les tombes de Gebel Silsila, charmant site sur les rives d’un Nil qui se rétrécit pour se faufiler entre d’abruptes falaises de grès. Nous explorons le site comme de grands enfants. A part le bawab et un policier qui s’improvisent guides avec beaucoup d’humour, il n’y a personne. Loin de la foule, dans le calme, nous pouvons bien arpenter, sauter de rochers en rochers pour entrer dans chacune des tombes qui ont vue sur la mer.

 

 

 

Le troisième jour, c’est le temple d’Edfou. Puis nous prenons le train pour Louxor, d’où nous allions récupérer notre train de nuit pour rentrer au Caire. Là encore, il faut se battre pour ne pas vider trop vite son porte-monnaie. Il est 14h30. Le guichetier veut nous vendre le train de 16h30, à 60 EGP chacun, prétextant qu’il a l’air conditionné. Maalich ça ne fait rien, c’est cher, tard et la clim n’est pas indispensable pour cette petite distance. Prix pour le train de 15h ? : 6 EGP chacun… Le trajet s’est très bien déroulé, et fut l’occasion de rencontres aussi typiques que chaleureuses !

 

Dans la campagne de la Haute-Egypte, loin, très loin de l’agitation de la ville et du tourisme, les rencontres sont d’une chaleur et d’une gratuité bouleversantes. A croire que moins les gens parlent anglais, plus ils ont le coeur sur la main.

 

Pèlerinage à Sainte-Catherine

Pendant trois jours, accompagnée du frère Adrien op, une partie de la SCEP est partie sur les traces de Moïse dans le Sinaï. D’emblée, rassurez-vous, je parle du sud du Sinaï, où les bédouins, comptant largement sur le tourisme pour vivre, tiennent la région d’une manière très sûre.

Après un très long trajet dû à d’incessants contrôles au niveau du passage du Canal de Suez, et avoir longé la côte pour éviter de couper à travers la montagne au sein d’un convoi militaire, nous arrivons finalement à Dahab, petite ville balnéaire. A Dahab, pas de plage, le rivage étant entièrement bétonné par les terrasses des restaurants. Pour se baigner, il faut donc s’attabler et payer une consommation minimum. De là, nous prenons un petit bus privé pour nous enfoncer à travers un paysage extraordinaire, pour enfin arriver au pied du monastère Sainte-Catherine. L’ascension peut commencer ! Nous empruntons la piste chamelière, qui nous fait gravir doucement mais sûrement le mont Moise (ou Sinaï), culminant à 2285 mètres, le deuxième sommet d’Egypte, l’un des très rares endroits où il peut neiger dans le pays. Il est révéré par les chrétiens, les musulmans et les juifs comme le sommet où Dieu dicta ses Dix Commandements à Moïse. On y trouve aujourd’hui une petite église et une petite mosquée, mais pas de petite synagogue. Au terme de la journée, nous célébrons la messe dans l’obscurité. Le lendemain, dès 4h30, les éclats de voix des touristes (aux accents plutôt russes) ayant fait l’ascension durant la nuit nous réveillent. A 5h, le soleil se lève insensiblement, gêné dans son triomphe par la griseur du ciel. Heureusement, ses chauds rayons finissent par dissiper la brume, et nous descendons alors vers le monastère, en passant cette fois par les 3750 marches du Repentir, plutôt raides, taillées dans le roc par un moine pénitent. En chemin, le jardin d’Elie, où Dieu serait apparu au prophète, nous offre un cadre idyllique pour la messe. A l’origine, le monastère se nommait monastère de la Transfiguration, événement durant lequel, devant trois de ses apôtres, Jésus apparut transfiguré entre Elie et Moïse. Mais au IXe siècle, les moines retrouvèrent intact le corps de sainte Catherine, martyre trois siècles plus tôt à Alexandrie, miraculeusement transporté sur l’actuel mont Sainte-Catherine, à proximité du monastère.

 

Un tas de sacs, un tronc de palmier, et voilà l’autel pour une messe à l’ombre, dans le creux d’un wadi, en pleine randonnée.

 

 

La vie au Caire

Mes élèves étant en vacances, mais les camps d’été ne commençant qu’après le Ramadan, je peux suivre un rythme assez léger. J’en profite pour être assidu aux cours d’arabe, il me faut des bases solides pour pouvoir pratiquer cet été, quand l’immersion arabophone sera réelle. Je me suis initié à la calligraphie, l’écriture arabe semble être faite pour cet art, qui n’est pas facile à maitriser. Les activités avec la SCEP se poursuivent, entre notre petite chorale et les lettres de saint Paul. L’opéra, malgré une coupure de courant en pleine représentation, nous a permis de fêter dignement deux anniversaires et une belle amitié avec une Egyptienne rencontrée par la providence à Assouan. Décidé à m’occuper intelligemment dans cette période creuse, je travaille à la relecture d’articles pour le quotidien francophone « Le Progrès égyptien », qui a accompagné cette année le club de journalistes du Collège. Des articles sur mon expérience en Egypte sont à venir, incha alla. Enfin, le 17 mai, le Ramadan a commencé, ce qui plonge le pays dans une ambiance et un rythme si particuliers que je ne manquerai pas de vous raconter.

 

Thibault van den Bossche en phonétique arabe, selon deux types de calligraphie différents, en haut par le professeur, en bas par votre serviteur.

Sortie au Fayoum

Les 18-19 mai, week-end SCEP au Fayoum, une immense et luxuriante oasis au sud-ouest du Caire. L’exploration en fut limitée, le temps étant compté et la chaleur assommante. Cependant, nous avons pu bien profiter de la piscine, de nos talents en cuisine, et d’un topo du frère Adrien venu nous rejoindre pour nous enseigner sur les divisions de l’Eglise, des chrétiens d’Orient jusqu’aux protestants en passant par les orthodoxes, et nous aider à réfléchir dans notre rapport au Salut dans le dialogue avec les chrétiens non-catholiques et les non-chrétiens. Soyez assurés de mes prières, comme je me sais dans les vôtres,

 

 

Thibault