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[LIBAN] Le témoignage d'Isaure et Hermine: "L’action des volontaires sur le terrain tisse la longue amitié entre les communautés et l’Œuvre d’Orient."

Isaure et Hermine chargées de mission au pôle jeunes de l’Œuvre d’Orient se sont rendues au Liban en décembre 2020, elles témoignent.


En octobre 2019 commençait la révolution au Liban. Ces blocus et révoltes ébranlaient le pays. La pandémie de la Covid en février 2020 a mis au ralenti l’économie et la société libanaise, comme partout ailleurs dans le monde. La crise économique a continué de s’amplifier, avant que la terrible explosion du 4 août ne vienne tout engloutir.

L’explosion

Quatre mois après, et bien que de beaux efforts de reconstruction et de solidarité aient vu le jour, le pays est encore sous le choc. Le visage de Beyrouth a changé, entre tas de décombres, immeubles béants, population masquée, et rubalises pour éloigner des zones accidentées. L’accueil chaleureux des Libanais s’est fait plus modeste.  Les communautés religieuses rencontrées évoquent avec pudeur leur difficultés à payer les salaires – parfois même à ne payer que la moitié des salaires, ou à s’acheter du dentifrice. En dix jours, le taux de change a doublé. « Même la guerre était moins pire qu’aujourd’hui », disent invariablement les communautés.

Et pourtant, les crèches sont installées sur chaque place publique, à chaque intersection. Les guirlandes lumineuses affichent l’espérance de Noël. Et les jeunes continuent de sortir dans les quelques bars de Mar Mickaël, avant que ne rappelle à l’ordre le gyrophare du couvre-feu. De même, les communautés ne manquent pas d’espoir, les projets naissent pour soutenir les familles les plus touchées : « ce qui est beau, touchant et douloureux, c’est la générosité de ce peuple » confie Roula, de l’association Anta Akhi.

La crise

Cependant, les multiples crises qui affectent le Liban aujourd’hui sont indéniables. Les communautés les prennent de plein fouet. Les écoles sont les premières affectées. Rares sont les parents pouvant payer la scolarité de leurs enfants, et d’ailleurs le prix en est tellement dévalué qu’il ne veut plus rien dire pour les communautés. De plus, les comptes des écoles ne permettent plus non plus de payer les salaires des employés et des enseignants. Certains concluent un accord pour travailler en contrepartie de la scolarité d’un enfant, comme à l’école Notre-Dame du Rocher d’Ajaltoun, où les sœurs ont installé un atelier de fabrication de masques pour les mamans d’élèves. Ce sont donc des immenses espaces vides que nous visitons. Aucun rire ou jeu d’enfants dans les cours de récréation. Heureusement, les communautés cherchent à conserver des contacts réguliers et sur le long terme avec les familles des élèves. Pour elles, l’école c’est le lieu de la vie, de l’apprentissage, des rires et des jeux. Des horaires sont aménagés pour que les élèves puissent venir sur des périodes de 40 minutes en classe, ou pour célébrer des messes de Noël en demi-groupe.

 

Action des volontaires

Nous avons noté chez nos 16 volontaires en poste au moment où nous sommes venues, une vivacité impressionnante pour s’adapter au mieux à la situation. De nombreuses idées voient le jour pour continuer de servir les communautés tout en étant au plus proche des plus pauvres. Délicatesse, adaptation semblent être les maîtres mots. À Roumieh, par exemple, Claire et Ines s’activent pour collecter des chocolats en France afin d’offrir aux sœurs et aux élèves un petit présent. Les trois autres volontaires enseignants s’ingénient à rendre vivante la langue française dans leurs cours et partagent leurs idées entre volontaires : histoire de l’art, comédie musicale, Tour du monde en 80 jours, les projets ne manquent pas.

Dans la cantine du quartier de la Quarantina, quatre volontaires sont membres de l’équipe du père Hany. Ils distribuent 2000 repas par jour aux familles victimes de l’explosion, tout en cherchant activement à développer la vente de produits locaux pour avoir des fonds et s’auto-suffire sans dépendre de dons extérieurs.

À Anta Akhi, Mission de Vie, et Message de Paix, les six volontaires sont prudents et confinés parce que leur mission est au plus près de personnes handicapées ou âgées, donc très vulnérables. Avec joie et dynamisme, ils soignent donc ces résidents et animent des activités quotidiennement, en construisant des relations profondes et de qualité avec la communauté et les résidents. Enfin, Aygline fait un travail formidable dans l’archevêché de Tripoli, en soutenant l’évêque dans ses lourdes tâches de suivi de chantiers, d’aide à la population, et de développement.

Des profils de volontaire très variés apportent ainsi un réel soutien et une amitié concrète aux communautés et aux chrétiens d’Orient qu’ils aident. Certains participent également aux projets d’autres associations d’aide sur leur temps libre comme l’association libanaise Offre-Joie, qui reconstruit les immeubles détruits de Quarantina. Enfin, tous cherchent à apprendre la langue arabe, et cela révèle une réelle volonté de compréhension et d’intégration dans la population libanaise. En janvier, nous avons dit au revoir à trois volontaires qui terminaient leur mission, et huit autres ont rejoint le Liban. Dans un contexte de pauvreté et d’épuisement, nous avons été témoins de l’espérance qu’insufflent communautés et volontaires pour soutenir un peuple en souffrance. L’action des volontaires sur le terrain tisse la longue amitié entre les communautés et l’Œuvre d’Orient.

 

Isaure & Hermine