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[LIBAN] Témoignage de Béatrix : "Il n’y a pas de doute, je suis bien imprégnée de la culture orientale !"

Béatrix, 23 ans, en mission auprès des sœurs âgées du foyer Sainte-Cécile de Bhannes au Liban.


Chers famille et amis,

Voilà 2 mois qui se sont écoulés depuis les dernières nouvelles. Ce n’est pas facile de mettre à l’écrit ce que je vis ici tant ma mission au foyer est riche. Je vais faire de mon mieux pour vous partager mon quotidien.

La mission

Depuis les dernières nouvelles, j’ai changé de mission pour rejoindre le foyer Ste Cécile au Centre Hospitalier de Bhannès chez les Filles de la Charité. Il s’agit d’une maison de retraite qui accueille une dizaine de résidentes, uniquement des femmes, âgées de 78 à 96 ans : des religieuses qui ne peuvent plus travailler, ou bien des femmes seules et pauvres.

Le foyer est dirigé par Sœur Jeanne, la supérieure de la communauté de 9 sœurs. Bien qu’elle ait le même âge que la plupart des résidentes, elle a une énergie débordante et se démène pour aider aux mieux les pensionnaires. Dans cette nouvelle mission, je suis ici avec Aliénor pour tenir compagnie aux résidentes du foyer qui ne reçoivent pas (ou peu) de visiteurs, et qui n’ont qu’une chambre impersonnelle pour décor.  J’aide aussi les aides-­‐soignantes et l’infirmière, notamment pour distribuer les plateaux repas, prendre la tension et plus occasionnellement pour changer les draps.

Bhannès se trouve dans les hauteurs, à l’est de la capitale. De là où nous sommes, nous avons une vue splendide sur Beyrouth et la mer d’un côté, et ND du Liban et la montagne de l’autre. Avec Aliénor, il nous arrive d’aller sur le toit de la ferme de l’hôpital pour profiter de la vue, des premières douceurs du printemps ou simplement passer un peu de temps au calme.

Ici, nos prénoms sont un peu difficiles à retenir, et encore plus à prononcer. On se fait donc appeler les  françaises ou bien sabaya (ce qui signifie jeunes). C’est quand même bien plus simple !

Pour mieux vous décrire ce que je vis ici, voici le déroulement d’une journée type :

7h45 : Ma journée commence par les laudes dans la chapelle du foyer avec les sœurs. Les Filles de la Charité sont d’une communauté latine, donc la liturgie des heures est en français.

8h30 : Après le petit-­‐déjeuner, c’est la première tournée des chambres. Je la fais plusieurs fois par jours, et je peux rester entre 5 et 30 minutes avec la même personne. Une de ces tournées est consacrée à la prise de tension. Avec Aliénor, nous avons appris à prendre la tension des résidentes pour réaliser un suivi quotidien de leur santé. Au début, en nous voyant arriver avec nos blouses blanches et le tensiomètre à la main, elles étaient toutes persuadées que nous sommes infirmières (ce n’est le cas ni de l’une ni de l’autre). Ces moments passés individuellement avec chacune sont des moments précieux de partage, d’écoute, de rire et parfois de compassion.

10h :  C’est  le  temps de  la  pause-­‐café  dans le  salon  avec les quelques résidentes qui peuvent se déplacer. Nous retrouvons donc Nihad (irakienne) qui ne parle ni ne comprend le français, Samiha (syrienne) qui le comprend mais ne le parle pas et Hélène (libanaise) avec qui nous n’avons aucun problème de compréhension. C’est donc l’occasion pour nous de développer notre vocabulaire libanais.

10h30 : Après le café, si nous n’avons pas terminé, nous continuons à prendre la tension. Sinon, il nous arrive d’aller jouer du piano pour celles qui le veulent, ou bien, nous allons visiter d’autres personnes. L’autre jour, alors que je jouais « Au clair de la lune » et « Frère Jacques » au piano, Hélène et Georgette se sont mises à chanter ! Elles m’ont fait fondre.

11h30 : Nous avons la messe soit en français (rite latin), soit en arabe (rite maronite). Pour bien suivre la messe maronite, nous avons un carnet français-­‐arabe, c’est bien pratique. Deux prêtres se relaient pour célébrer la messe tous les jours dans la chapelle du foyer. Avoir la messe quotidiennement est une chance, cela permet de se recentrer sur l’Essentiel au milieu de notre journée.

12h :  Arrive l’heure du repas des  résidentes.  J’aide les aides-­‐soignantes à  distribuer  les plateaux, je m’assure que Nihad ne cache pas ses médicaments dans son lit. Il m’arrive d’aider Georgette à prendre son déjeuner car elle ne peut se nourrir seule, ou bien d’être auprès de Sœur Vera qui a parfois besoin d’assistance.

14h45 : Après notre déjeuner et un temps calme, la journée se poursuit. Tous les jours, nous jouons au Scrabble avec Soad, une ancienne professeure de français. Quand elle ne connaît pas un mot, elle s’étonne en disant que c’est du nouveau français. Une fois la partie terminée, la tournée des chambres continue.

17h :  C’est l’heure du souper  des  résidentes.  Comme pour le  déjeuner,  j’aide  les  aides-­‐ soignantes à distribuer les plateaux, je tiens compagnie à certaines d’entre elles ou bien j’aide Georgette ou Sœur Vera.

17h30 -­‐> 18h : Pendant que les sœurs prient les vêpres, je retrouve Aliénor dans la chambre de Lisette, la sœur d’une Fille de la Charité qui ne peut plus parler, ni presque bouger du fait d’une tumeur au cerveau. Nous lui tenons compagnie et cela soulage Sœur Germaine qui consacre la totalité de ses journées à sa sœur. […]

Je suis ravie de ma mission. Tenir compagnie à des femmes âgées et seules procure une joie immense. Face à l’immobilité de certaines, la vieillesse et la souffrance, nous mettons de côté nos tracas et tentons de divertir ces femmes qui acceptent plus ou moins leur état physique ou mental. Cela demande une grande disponibilité, de l’écoute et une grande patience. Je m’attache beaucoup à elle. Lorsque nous partons du foyer le temps d’un week-end, je reviens en étant très contente de démarrer une nouvelle semaine auprès des résidentes et de la communauté. […]

Carême et Pâques

Cette année, ce temps liturgique revêt pour moi un aspect très particulier car la majorité des messes est en arabe. Il n’y a pas de doute, je suis bien imprégnée de la culture orientale ! Dans le rite maronite, le Carême débute le Lundi des Cendres, et on dit qu’il se termine avec l’enterrement de Jésus le Vendredi Saint. Après l’office de la Passion, nous avons donc enterré la Croix dans un drap violet avec des fleurs sous l’autel. Au foyer, le temps du Carême était ponctué par des Chemins de Croix tous les vendredis. Avec quelques volontaires, nous avons passé le week-­‐end des Rameaux dans la Qadisha (la Vallée Sainte) dans le monastère de la Qannoubine. Nous y étions avec un père maronite et sa famille ainsi que des volontaires allemands de  l’Ordre de Malte.  C’était un week-­end extra, très ressourçant, avec une super ambiance.

Pour Pâques, nous avons eu un réveillon festif après la Vigile Pascale. Puis pour le Dimanche de Pâques, les sœurs ont invité les aides-soignantes et cuisinières pour le déjeuner. Aliénor et moi avons préparé un gâteau au chocolat pour le dessert. Le chocolat est devenu un luxe au Liban, c’était notre manière de remercier les sœurs qui nous accueille merveilleusement, elles étaient ravies.

Al  Masih  kam,  Hakkan  Kam  ! (Le Christ est ressuscité, Il est vraiment ressuscité !)

Je vous souhaite à tous une belle Octave de Pâques et vous garde dans mes prières,

Béatrix.