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[LIBAN] Le Témoignage de Magali : "Beyrouth porte les signes de dévotion des libanais chrétiens comme un blason."

Magali, volontaire chez le père Hani Tawk à Beirut où elle distribue chaque jour des repas et de l’aide alimentaire.


Akhirran ! J’ai quitté la France, son confinement et son confort pour m’envoler vers Beyrouth et son chahut !

Voilà 10 jours que je ne vais que de rencontres en surprises. Dans le cadre de ma mission, je suis en effet en contact quotidien avec les familles – qui ont vu leur logement devenir inhabitable par l’explosion- et avec les ouvriers qui œuvrent courageusement à la reconstruction du quartier. Après la préparation du déjeuner, pendant le rush du service, entre deux rations tendues, on trouve toujours l’opportunité d’échanger quelques mots avec quelques-uns d’entre eux. Les visages, au fil des jours, deviennent familiers. Quarantina est mon quartier de mission : au milieu des 6 200 bâtiments détruits laissant sans abri plus de  300 000 personnes, le Père Hani a monté une cuisine au fonds d’un garage détruit. Nous servons environ 500 repas chauds par jour à cette population qui, en plus de leurs habitations démolies, ont vu leur pouvoir d’achat s’effondrer (un paquet de céréales coûte l’équivalent de 4$, quand le salaire moyen libanais est de 700$ mensuel). Au-delà de la distribution à l’heure du déjeuner, plusieurs livraisons de repas sont organisées pour des familles modestes en dehors du quartier : l’occasion de regarder de mes propres yeux l’étendue des dégâts. Entre rues jonchées de débris de verres, de poussière et de traces d’obus aux murs, on ne sait plus distinguer la cause de ce chaos : guerre civile ou explosion ?

Paul, Volontaire de Quarantina avec moi à ND du Mont LibanLIB
Ibrahim (surnommé Bob) volontaire libanais !

En fin d’après-midi, une fois le travail terminé, vers 16h mais il nous semble être 20h à cause de la fatigue et de l’obscurité (le soleil se couche à 16h30 – 17h), nous avons le temps, avec les autres volontaires de la mission, de flâner dans les rues de Beyrouth. Outre le chantier affairé de la reconstruction, les enfants non scolarisés qui jouent bruyamment et le ronronnement incessant des voitures, je suis frappée par la foi démonstrative des libanais. La religion est omniprésente dans les quartiers chrétiens. En effet, au-delà de l’accueil chaleureux et de toute la bienveillance qui nous est manifestée, les crucifix remplacent les arbres magiques dans les voitures libanaises, des images de St Charbel sont dans tous les petits bouibouis (garages, commerces, restaurants…) et on aperçoit aux coins des rues des statues de la Vierge. Cette foi ostentatoire me semble une vraie chance pour la jeune génération désorientée et choquée par la brutalité de la crise et de l’explosion. En effet, le Liban est un pays qui ne renie pas son Histoire et ses symboles religieux chrétiens dans lesquels s’incarne la culture d’une grande partie des libanais (plus de 40% de chrétiens). Beyrouth porte les signes de dévotion des libanais chrétiens comme un blason et ils symbolisent autant de chance pour la jeunesse déboussolée d’entrer en contact avec le précieux héritage spirituel du pays et de s’ancrer dans la lignée de leurs prédécesseurs !

Ma mission prend du sens dans cette vision : mes petites mains pour la cuisine seraient très largement remplaçables par un autre que moi, notamment par un libanais ! Pas besoin d’une française pour éplucher des kilos de carottes ou couper des pommes de terre….