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[LIBAN] Témoignage de Charlotte : " Pour certains professeurs, leurs salaires ne couvrent même pas le prix des barils d’essence ..."

Charlotte, 25 ans, ingénieure informatique, a choisi de donner 6 mois de sa vie auprès de l’école Notre Dame de Sahel – Alma à Jounieh.


Le début de mission 

Je suis arrivée il y a maintenant 3 semaines, en même temps que Cécile, à l’école Sahel Alma à Jounieh. […] Je suis donc arrivée un jeudi soir au Liban, le lendemain d’une tempête de neige, accompagnée d’une inconnue avec qui je n’avais pas le choix que de bien m’entendre et accueillies par deux petites bonnes sœurs, Sœur Dalida et Sœur Clodette. Cette arrivée me marquera longtemps car c’est uniquement lorsque nous fûmes toutes les quatre dans la voiture que j’ai pleinement pris conscience que j’allais vivre 6 mois incroyables !

 

Et effectivement, mon absence d’attente a accentué les bonnes surprises ! La communauté, constituée de 8 sœurs, est incroyablement chaleureuse accueillante et bienveillante (les cadeaux continuent de s’accumuler dans la chambre, dont un bonnet tricoté par sœur Rita). Le fait que nous soyons les premières volontaires à venir dans cette congrégation doit aider mais je pense que cet accueil chaleureux est surtout caractéristique de la culture Libanaise. Sans oublier notre incroyable Sœur Dalida qui, en plus d’être la capitaine d’une école qui traverse une triple crise, économique, politique et humanitaire, trouve toujours du temps pour s’improviser guide touristique ou professeur d’arabe à ses heures perdues. Bref, l’accueil est dingue.

 

Concernant la mission, nous remplaçons les professeurs absents du CP à la terminale. Dans l’ensemble tout va bien, je suis impressionnée par la qualité de l’éducation libanaise et par la gentillesse des élèves. Ce n’est pas toujours très évident de capter leur attention pendant une période entière mais ils sont curieux et ravis de voir de nouvelles têtes. En particulier après ces dernières années marquées par le covid et la crise, la quasi-totalité de leurs sorties et de leurs activités ont été annulées. Au début, notre rôle n’était pas très clair et j’avais un peu de mal à comprendre l’utilité de volontaires dans une école si harmonieuse. Ce n’est que plus tard, après de nombreuses conversations avec les sœurs et certains Libanais, que j’ai commencé à comprendre la tourmente du pays. Pour certains professeurs, leurs salaires ne couvrent même pas le prix des barils d’essence dont ils ont besoin pour leurs trajets quotidiens. […] S’ils ont pu survivre depuis la crise de 2019 c’est en partie grâce à leur économies et d’autre part grâce à l’entraide et l’union des familles. Mais la situation continue de s’aggraver et leur seule vision d’amélioration est de quitter le pays. C’est donc plus un rôle de soutien psychologique que purement pratique que nous faisons ici. Cette école ne fait pas partie des plus pauvres du pays mais elle a néanmoins grandement besoin soutien. Et c’est peut-être cela qui m’a le plus dérouté. Toutes les personnes liées à l’école, professeurs comme élèves font partis des « anciennes » classes moyennes, elles n’ont donc pas pour habitude de demander de l’aide mais n’arrivent plus à s’en sortir.

Chaque jour j’apprends mille choses et je fais mille découvertes. Entre l’apprentissage de la pédagogie, l’apprivoisement des 900 élèves, l’apprentissage de la vie en communauté religieuse, la culture, l’arabe… J’ai pour l’instant l’impression que le temps va me manquer et que j’aurai eu besoin d’un an complet pour vivre pleinement cette expérience. Espérons que, passées les premières impressions, mon ressenti ne change pas.