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[LIBAN] Le témoignage de Maxime : "Ce vivre ensemble est pour moi également le maître-mot d’Anta Akhi"

Maxime, 30 ans, ingénieur agricole, est volontaire pour 4 mois au sein de l’association Anta Akhi à Beyrouth.


Le contexte actuel au Liban 

Le Liban est meurtri par une crise économique et politique sans précédent, pire selon ma communauté, que la guerre civile, les Libanais ayant perdu toute confiance en l’avenir après des années d’espoir et de déception à répétition.

Cette crise, je l’ai ressenti à mon arrivée au travers des pénuries d’essence provoquant des files d’attentes interminables aux stations et les longues coupures d’électricité ; ajoutée à cela une inflation exponentielle, qui place 60% des Libanais sous le seuil de pauvreté, obligeant de les travailleurs à cumuler deux voire trois jobs différents pour survivre financièrement.

Malgré la situation, à travers mes excursions, j’ai été très surpris d’observer chez tous un caractère joyeux, bienveillant et chaleureux, attentifs à tes besoins, cherchant à te connaitre et à te proposer de l’aide d’une manière totalement désintéressée.

En guise d’exemples non exhaustifs, à Saida, un Libanais croisé par hasard dans le souk nous invite au restaurant et s’improvise guide touristique durant 4 heures. A Batroun, une boulangère retourne le village pour trouver celui qui détient les clés de l’église orthodoxe Saint Catherine actuellement fermée afin qu’on puisse la visiter. Chaque soirée en compagnie de libanais, tu ressors avec plusieurs numéros de WhatsApp, tous voulant t’inviter à venir diner chez eux à grands coups de « Ahla wa Sahlan » (soyez le bienvenu). À Afqa, une dame ouvre son restaurant exclusivement pour nous, situé au bord de la source du fleuve Nahr Ibrahim, en prenant soin de concocter le menu traditionnel (Tawouk, houmous et tabouleh)

« Le liban, plus qu’un pays, il est un message » disait Jean Paul II. Cette phrase prend tout son sens quand on côtoie pour la première fois le pays du cèdre.

Ici tout est question de pluralité : un mélange de religions, de cultures, de langues. C’est un message adressé au monde sur le vivre ensemble.

Ce vivre ensemble est pour moi également le maître-mot d’Anta Akhi, cette association dans laquelle j’ai démarré mon volontariat, œuvre comme témoin auprès de la société. Elle a pour mission de montrer que les « jeunes » en situation de handicap et bien-portants, tous enfants de Dieu, peuvent vivre ensemble, différents mais complémentaires, tout en mettant la dignité de ces jeunes au premier plan.

Chaque jeune est porteur d’un message de vie et d’une force d’âme acquise au gré des années; qu’ils transmettent volontiers en sensibilisant le réseau de la communauté (écoles, université, etc.).


Ma mission : 

Dès mon arrivée, je me suis vite senti comme un poisson dans l’eau. Le temps passe si vite. La vie y est simple, ponctuée de moments de partage où chacun exclut la barrière de la langue et s’apprivoise doucement au fil du temps par des gestes, des paroles et des sourires. Ce premier mois, l’équipe de choc de volontaires, prête à servir, se crée progressivement selon les arrivées et s’applique minutieusement à suivre l’apprentissage pour accompagner les jeunes.

Au sein de cette maison catholique officiant la semaine selon le rite maronite et grec-melkite, la parole de Dieu est omniprésente. Je suis captivé par la foi inébranlable dont ils font preuve.

Les membres de la communauté, accueillants comme ils sont, ont sans cesse envie d’interagir avec toi. Si fier de la beauté de leur pays, tu les écoutes avec avidité. Pourtant, ils ne peuvent s’empêcher d’évoquer avec tristesse la situation actuelle du pays, en faisant usage de cet art oratoire poétique propre aux libanais ; de vrais pères castors qui te fascinent. Malgré cet amour inconditionnel de leurs terres, nombreux sont ceux qui souhaitent quitter le pays pour une vie meilleure.

Au quotidien, je vis des instants uniques avec les jeunes qui se multiplient quand ils te laissent avec humilité rentrer dans leur intimité.

En voici quelques exemples :

  • Tony : En attendant l’ascenseur, un collègue sort sa guitare et Tony se transforme en diva chantant une musique de Fairuz, l’idole nationale.
  • Pierre : Au bout de la cinquantième partie de puissance 4, je commence enfin à presque l’égaler.
  • Kiko : Ce poly-handicapé me regarde constamment avec ses grands yeux tendres pleins de reconnaissance.
  • Eli (un Libanais sur deux s’appelle Eli) : Fermé comme une huître au départ par ma présence, après une semaine à m’affairer à satisfaire ses besoins, il sourit enfin à mon contact et m’appelle dorénavant Habibi.
  • Les sœurs Aida & Samo : Troisième fois de la journée où je me lance dans la récupération de pièces de puzzle coincés sous le canapé. J’ai eu droit pour cela à un cœur de main en guise de remerciement. Ces remerciements, les jeunes n’en sont pas avares : je suis proche des mille mercis par jour, ce qui me déstabilise profondément.

Pendant mon temps libre, j’ai la furieuse envie d’explorer ce pays si coloré. Un pays égal en superficie au département de la Gironde mais disposant d’une immense collection de trésors millénaires, positionnés entre terre et montagne et liés aux évangiles et à la vie des saints. Au contact des locaux qui se livrent facilement, je prends aussi un grand plaisir à écouter leur histoire liée à un système multiconfessionnel unique au monde.

Bref, à peine un mois et j’ai déjà vécu une expérience de vie très riche sur cette terre d’accueil.

 

Bchoufkon !