Une crèche sans toit

Cette année la tâche de préparer la Crèche de Noël à la Cathédrale de Damas a été confiée aux jeunes qui ont recommencé à se réunir après huit ans de violence et de dispersion.

À leur surprise les fidèles découvrent à gauche de l’Autel une grande crèche faite sans toit. La Famille Sainte sous les belles étoiles… Scène surprenante… Les fidèles sont étonnés de cette nouveauté imprévue.

Interrogeant les jeunes sur les raisons ils ont répondu :

Une crèche sans toit ressemble davantage aux 13 000 000 de réfugiés syriens qui n’ont plus de toit. L’Enfant Jésus est l’Un d’eux. Nous avons voulu être solidaires de nos compatriotes réfugiés démunis et oubliés en créant cette Crèche sans toit à l’image de leurs ruines, découverts au Grand Ciel d’où vient leur seule Espérance.

Rendons grâce à l’enfant divin pour ces jeunes d’avoir permis de vivre ce beau message de solidarité spirituelle qui nous interpelle.

 

+ Samir NASSAR

Archevêque Maronite de Damas

Témoignage de Philippine, volontaire de l’Œuvre d’Orient à Jérusalem

Philippine, 25 ans, est volontaire de l’Œuvre d’Orient depuis février 2018 et pour un an. Ancienne de Skema Business School elle est l’adjointe du directeur du Home Notre Dame des Douleurs à Jérusalem Est. Elle est un soutien indispensable pour l’organisation administrative de cet hospice pour personnes âgées. Trois autres volontaires de l’Œuvre d’Orient l’ont rejointe pour apporter des soins et entretenir les installations. Son remarquable sens de l’organisation et son expérience l’a fait désigner pour diriger l’été 2018 une session de français pour des jeunes élèves d’une école de Palestine durant 15 jours.

 

 

Jérusalem, 26 Novembre

 

 

Salam !

 

 

Alors que je fêtais il y a quelques jours mes 9 mois de présence ici, j’ai enfin vu arriver l’automne. Après presque 6 mois d’un été interminable, sans une goutte de pluie, nous avons regarder tomber les gouttes plusieurs jours d’affilé, avec plaisir.

Tout juste mariés, Ludovic et Mathilde sont arrivés mi octobre pour une année. Ludovic a en charge tout l’entretien du jardin (il tombe à pic) et la maintenance générale de la maison. Il a de quoi faire pour plusieurs années ! Mathilde est psychomotricienne et est intégrée à l’équipe de soins, en essayant de mettre à profit ses compétences professionnelles. Leur arrivée nous permet d’avoir de nouveaux projets, à plus ou moins long terme, pour la maison et les résidents. A tour de rôle nous avons en charge plusieurs activités avec les personnes âgées : bricolage, peinture, jardinage…l’idée est d’essayer de créer des choses pour la maison en mettant tout ceux qui le veulent à contribution (nouveaux plans de table, décoration de Noël, jardin potager et jardin d’intérieur…).

Alors que je commençais à regretter de ne pas suffisamment partager avec les résidents, ce nouvel élan change la donne ! Trouver des activités n’est pas toujours évident. On voudrait les garder occupés en permanence mais ce n’est pas possible. Leurs capacités physiques et mentales sont très inégales et ils sont vite lassés ou fatigués. Mais on arrive toujours à capter l’attention et l’intérêt de deux ou trois d’entre eux pendant un moment, parfois plus et c’est jackpot ! On est constamment surpris par leur enthousiasme ou leur reconnaissance. Globalement, notre temps et notre énergie est ce que nous avons de plus précieux à leur offrir. La lourdeur administrative de la moindre procédure et notre manque de moyens financiers ne nous aident pas à rendre le quotidien meilleur.

 

 

 

Heureusement, les bénévoles sont nombreux, et comblent parfois le manque de salariés. Et ces derniers en profitent largement aussi : la moindre occasion est bonne pour faire participer les bénévoles pour le ménage, la vaisselle, les soins…Leur façon de travailler leur est bien propre et nous sommes constamment étonnés, la femme de ménage par exemple lave le sol au shampoing parce que ça mousse (alors que la javel ça ne mousse pas !).

 

La souplesse et la confiance qui me sont accordées me donnent la liberté de faire ou de proposer ce que je veux ; c’est très enrichissant mais c’est aussi difficile. Difficile de réussir à cibler et comprendre ce qui envisageable. Bien que certaines façons de faire m’ont étonné à mon arrivée, je n’ai pas d’éléments de comparaison auxquels me fier sur la gestion d’un établissement de santé. Il s’agit de plus d’une structure religieuse, pas encore aux normes médico-légales du pays. Concernant les normes de santé, nous attendons, patiemment, des retours de nos plus gros donateurs pour lancer des travaux d’envergure. Ces travaux visent à revoir entièrement la structure des bâtiments (système de plomberie, d’électricité, taille des chambres…) et à réadapter le matériel de santé, disposer de salles spécialisées et adéquats aux différentes pathologies… D’ici là, on bricole les fuites et on s’occupe de chacun au mieux. De plus, les adaptations ou changements possibles sont parfois difficiles à mettre en place et demandent du temps et de la patience. Pas toujours évident pour nous, jeunes volontaires français prêts à changer le monde, de jouer avec ces difficultés en restant confiants et enthousiastes. La clé est justement de comprendre que personne ne nous attend, ni ne nous demande, de changer le monde. Notre vraie richesse est celle d’être capable de nous adapter aux possibilités et aux façons de faire.

Plus à l’aise dans mon environnement, je sors parfois des taches administratives, pour aller faire une partie d’échecs avec David, donner un coup de main pour éplucher des pommes, poncer des bancs de jardin pour les repeindre…

A 1 mois et demi de la fin, j’essaie de rester ici à 100% et de continuer à m’investir comme au premier jour.

 

 

Je n’ai pas fini de découvrir Jérusalem et les alentours, toute nouvelle sortie est sujette à découverte. Je continue de rejoindre un groupe de sport deux fois par semaine, essentiellement constitué de jeunes palestiniens de Jérusalem. C’est un des rares moments et lieux ou je côtois réellement des locaux de mon âge avec une vie presque comparable à celle qu’on peut avoir en France (mise à part que la plupart n’a jamais bu une goutte d’alcool ou mangé de saucisson…). Malgré toutes nos différences, nous partageons au moins une chanson : frère Jacques, qui chez eux s’appelle Ahmad, forcément !

 

Yallah bye !

 

Vivre la messe de Noël 2018 avec les chrétiens d’Orient – lieux et horaires à Paris

Église chaldéenne Notre-Dame de Chaldée

Lundi 24 décembre

  • 18h : Célébrations festives

 

13-15 rue Pajol, 75018, PARIS

 

 

 

Église chaldéenne Saint-Thomas Apôtre

Mercredi 25 décembre       

  • 10h à 12h30 : Messe de la Nativité

 

7-11 rue du Champ Gallois, SARCELLES, 92500

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Église maronite Notre-Dame du Liban

Lundi 24 décembre       

  • 20h : Messe de la Nativité

Mardi 25 décembre       

  • 11h et 18h : Messes de la Nativité

 

17 rue d’Ulm, 75005, PARIS

 

 

 

 

 

Chapelle éthiopienne et érythréenne de la Médaille miraculeuse

Lundi 24 décembre       

  • 17h15 : Messe de la veille de Noël

Mardi 25 décembre       

  • 8h30, 10h et 11h30 : Messes
  • 15h30 : chants de Noël avec la Communauté des Filles de la Charité
  • 18h50 : Vêpres

 

140 rue du Bac, 75007, PARIS

 

Église greco-catholique de Roumanie Saint-Georges

Lundi 24 décembre       

  • 20h: Messe de la veille de Noël

Mardi 25 décembre       

  • 11h : Messe de la Nativité

Mercredi 26 décembre

  • 11h: Messe

Jeudi 27 décembre

  • 11h: Messe

 

39, rue François Gérard, 75016, PARIS

 

 

Église grecque-melkite catholique Saint-Julien le Pauvre

Lundi 24 décembre       

  • 19h: Messe de Noël

Mardi 25 décembre       

  • 11h : Divine liturgie

Samedi 05 janvier

  • 18h: Messe

Dimanche 06 janvier

  • 11h: Messe

 

1, rue Saint-Julien le Pauvre, 75005, PARIS

 

 

 

Scouts Alep

[VIDEO] Des scouts d’Alep remercient des scouts d’Europe pour leur course au profit des chrétiens d’Orient

Des scouts d’Alep nous ont envoyé une superbe vidéo afin de remercier les Guides et Scouts d’Europe, province Hainaut-Artois-Flandres, pour leurs deux courses réalisées au profit des chrétiens d’Orient ! La première course a eu lieu à Lille et la deuxième à Douai (220 jeunes ont participé). Les enfants et encadrants sont d’ailleurs déjà prêts pour une nouvelle course l’année prochaine !

Les dons récoltés grâce aux courses seront à partager entre l’Œuvre d’Orient et l’Aide à l’Église en détresse.

 

Voeux 2019

« Cette fête de Noël sera je l’espère, la fête de l’Espérance » : les vœux de Mgr Pascal Gollnisch

« Ce qui s’est passé à Bethléem concerne l’humanité entière et nous occidentaux, nous recevons cette lumière de la part de nos frères d’Orient qui nous l’ont annoncé eux aussi avec les anges. Cette fête de Noël sera donc je l’espère, la fête de l’Espérance en la force du bien qui est beaucoup plus puissante que la force du mal ». Mgr Pascal Gollnisch, directeur de l’Œuvre d’Orient.

Syrie Mgr Gollnisch

Pascal Gollnisch : « Le dialogue religieux ne doit pas avoir de tabou »

Les monothéismes sont-ils en train de devenir des frères ennemis ? Haine, crimes de masse, fantasmes de « guerres saintes » font craindre la fin d’une coexistence millénaire. Pour Monseigneur Pascal Gollnisch, directeur de l’Oeuvre d’Orient, association de l’Eglise de France qui vient en aide aux chrétiens d’Orient, mais aussi aux autres communautés de la région, il faut promouvoir le dialogue religieux et l’idée de citoyenneté, pour éviter une séparation qui serait catastrophique.

Monseigneur Pascal Gollnisch, né en 1952, est directeur général de l’Œuvre d’Orient et l’auteur de Chrétiens d’Orient : résister sur notre terre (Le Cherche Midi, 2016). Cette « oeuvre », créée 1856 par des professeurs à la Sorbonne, vient en aide dans le domaine de l’éducation, des soins, de l’aide sociales de la culture et du patrimoine,  aux chrétiens d’Orient et à travers les institutions chrétiennes de la région, aux autres communautés religieuses.

 

Les trois monothéismes peuvent-ils encore coexister, en particulier au Moyen-Orient, cette région qui les a vus naître ?

Oui, bien sûr, la coexistence est toujours possible. Mais cette coexistence est menacée. A terme, le Moyen-Orient pourrait se vider totalement de ses chrétiens. C’est ce que font craindre les crises syrienne et irakienne, en particulier avec l’exacerbation des groupes radicaux, Al Qaida d’abord puis l’État islamique. Ces organisations ne viennent pas de nulle part. Elles ont pu se développer sur l’idée que ces sociétés à majorité arabe et musulmane sont opprimées par les gouvernements locaux. En outre, ces populations opprimées se sont senties abandonnées par les musulmans du Golfe. Le monde arabo-musulman connaît de profondes inégalités, et un manque de solidarité. Et plus que tout, les musulmans se sont sentis victimes de la politique des États-Unis, avec les invasions de l’Irak et de l’Afghanistan, le soutien systématique aux Israéliens, malgré la colonisation en territoire palestinien, et enfin, l’appui aux dictateurs. Ce sentiment d’oppression et les déconvenues par exemple des guerres contre Israël, ont provoqué un repli sur une identité musulmane idéalisée, et fait prospérer le djihadisme et l’idée de « guerre sainte ».

 

Mais l’islam n’est pas le seul à connaître des dérives qui provoquent des tensions.

Chacun des grands monothéismes peut tomber dans un tel repli. Le christianisme avec certains évangéliques, extrémistes catholiques, ou certains orthodoxes. Pareillement, on trouve un fondamentalisme dans le judaïsme. Tout comme d’ailleurs la laïcité a ses ayatollahs. En fait, une certaine forme de mondialisation apparaît aux populations comme menaçante, elle leur semble risquer de niveler toutes les identités, et provoque ces révoltes. L’islamisme n’est qu’une réaction par rapport à la mondialisation.

 

Quelles sont les causes de ce repli ?

L’islam se sent d’abord menacé par le rationalisme. Pourra-t-il continuer à dire que le Coran est parole divine ? Le christianisme a connu les mêmes questionnements, depuis la Renaissance, avec l’essor de la critique textuelle. L’islam est aussi en crise à cause de l’individualisme contemporain, difficile à accepter pour une religion profondément sociale, collective plutôt que réellement communautaire, où tous sont censés prier et agir à l’identique face à Dieu. Enfin, l’islam manque aujourd’hui d’une théologie de l’histoire. Nous, les chrétiens, nous avons développé très tôt une telle théologie de l’histoire. Durant ses trois premiers siècles du christianisme, l’Église s’est construite face aux persécutions. Nous savons donc que les « signes de notre temps », comme les nomme le concile de Vatican II, ne sont pas les mêmes que ceux du temps de Paul. Nous pouvons nous permettre de le contredire, quand il dit que les femmes doivent avoir la tête couverte et se taire, parce que nous savons qu’il parlait dans son contexte, et que le contexte a changé. L’islam s’est fixé au moment même où il a connu un essor fulgurant. Avant même que le Coran ne soit terminé, l’empire islamique s’étend de l’Inde au sud de la France ! C’est pourquoi les croyants donnent donc toute confiance en Allah, le pouvoir politique et le pouvoir religieux se confondent. Comme dans toutes les religions, les musulmans aspirent à une pureté de la foi. En proposant de retourner au premier siècle de l’islam, le radicalisme musulman veut réaliser cette pureté de la foi. En cela, l’islamisme est un archaïsme.

 

En quoi les persécutions contre les chrétiens d’Orient ont-elles une dimension particulière ?

Ils sont d’abord victimes de discriminations juridiques, politiques et sociales souvent très lourdes. Ce n’est pas négligeable, cela provoque beaucoup d’exils ! Ensuite, il y a des attentats ponctuels, comme le massacre de la cathédrale de Baghdad en 2010, ou les attaques régulières contre les coptes. Enfin, il y a eu des vagues de persécutions proprement dites, violentes et massives, avec Al Qaida et Daech. Juifs et musulmans du Moyen-Orient aussi ont connu des persécutions, toutes sont condamnables. Mais ce qui est particulier avec celles d’aujourd’hui contre les chrétiens d’Orient, comme avec celles contre les Yézidis, c’est qu’elles mettent en jeu la survie des communautés. Les Chrétiens d’Irak étaient plus d’un million en 1980, ils sont désormais moins de 400 000. Personne n’imaginerait une disparition des sunnites ou des chiites du Moyen-Orient. Les chrétiens d’Orient peuvent disparaître.

 

Pourquoi ne pas se résoudre à cette extinction ? Les chrétiens d’Orient n’ont-ils pas vocation à vivre en Occident, avec d’autres chrétiens ?

Parce qu’au même moment où les chrétiens risquent de disparaître d’Orient, il y a une présence croissante de l’islam en Europe. Mais l’intégration des musulmans en Europe ne peut pas se faire paisiblement en même temps qu’une disparition des chrétiens dans les pays d’islam ! Pour que les musulmans puissent vivre dans les sociétés à majorité chrétienne, il faut que les chrétiens puissent vivre dans des sociétés à majorité musulmane. Ce qui est possible au Nord doit être possible au Sud. D’autant que contrairement à ce que veulent faire croire les fondamentalistes, beaucoup de musulmans souhaitent vivre avec des juifs et des chrétiens. De même des juifs continuent de vivre dans des sociétés musulmanes ou chrétiennes, et une partie des juifs d’Israël ne veulent surtout pas que leur pays exclue les non-juifs. Et en ce qui concerne le christianisme, si nous ne sommes pas dans une position de respect et d’écoute des autres religions, nous ne sommes pas fidèles au Christ. C’est dans l’Évangile, ce n’est pas un choix du XXIe siècle !

 

Que peuvent nous apprendre les chrétiens d’Orient sur la coexistence entre les monothéismes ?

Ils nous apprennent d’abord que le christianisme est une religion orientale. Certains croient que le christianisme est une religion européenne, parce qu’il est exprimé ici dans la culture gréco-latine, dans les codes de l’empire romain, les basiliques, le rouge cardinal, le souverain pontife… Mais les Européens doivent rester décentrés par rapport au christianisme, comprendre qu’ils n’en sont pas les propriétaires. Ensuite, les chrétiens d’Orient peuvent nous raccrocher au temps long de l’histoire. Les problèmes d’aujourd’hui datent de plusieurs siècles. Bush et Trump n’ont pas inventé les conflits entre chiites et sunnites !

 

Comment retrouver la voie de la coexistence ?

D’abord, avant de parler de dialogue inter-religieux et de coexistence entre les communautés, il faut reconnaître que ces problèmes de coexistence viennent d’une intrication trop forte entre religieux et politique au Moyen-Orient. Les religions se laissent instrumentaliser par le politique. La citoyenneté peut seule nous permettre de surmonter cela. Il faut donc une pleine citoyenneté pour tous, plutôt que de faire valoir les droits des communautés. Ensuite, après avoir réglé cette question de la coexistence politique, on peut travailler à la coexistence proprement religieuse. Comment les gens de diverses religions peuvent se reconnaître, s’écouter, s’accepter dans un respect mutuel ? Les lieux de coexistence et les échanges intellectuels sont essentiels pour cela.

 

De quoi juifs, chrétiens et musulmans peuvent-ils discuter ensemble ?

Il faut certes parler des problèmes pratiques de la coexistence, de politique, du respect quotidien, du vivre-ensemble. Mais il ne faut pas seulement ouvrir ce « dialogue de la rue », mais aussi un dialogue religieux. Tout d’abord, mettons-nous d’accord sur qui est Dieu pour chacun. Nous ne croyons pas exactement dans le même Dieu. Il faudrait se connaître davantage, pour être conscient de ses différences. Mais les fidèles de chaque religion ignorent souvent tout des autres monothéismes. Ensuite, nous avons en commun la prière. Ce n’est pas la même prière, je ne suis pas pour un syncrétisme de la prière, pour inventer des prières judéo- ou islamo-chrétiennes. Je préfère que nous prions les uns à tour de rôle, et apprenions à respecter la prière des autres. Enfin, nous devons nous rendre compte que ce que nous disons de l’être humain est finalement ce qui nous réunit le plus, et nous différencie par exemple des athées évolutionnistes. Pour les trois religions, l’être humain est une créature de Dieu.

 

Jusqu’où peut aller ce dialogue ?

Justement, il ne doit pas avoir de limites. Le dialogue religieux ne doit pas avoir de tabou. Ainsi, on doit pouvoir condamner toutes les discriminations, quand elles sont contre des musulmans en France, mais aussi quand elles sont contre des chrétiens en Orient. Dans beaucoup de pays, il est impossible par exemple pour une femme musulmane d’épouser un chrétien. Et un musulman qui se convertit au christianisme met sa vie en danger. C’est inadmissible. Les gens doivent être libres. En France, certains croient que ce dialogue atténue nos convictions catholiques. Mais tout au contraire, ces questions que peuvent me poser l’islam et le judaïsme me conduisent à creuser mon identité chrétienne. Et j’ose espérer que ce sera la même chose pour des juifs ou des musulmans.

 

 

Propos recueillis par Jérémy André, pour Le monde des religions

 

Les chants de Noël dans la tradition gréco-catholique roumaine

 

Parmi les symboles annonciateurs de la fête de Nativité (le calendrier et la couronne de l’Avent, l’arbre de Noël, etc), les chants traditionnels de Noël ont une place particulière pour l’esprit gréco-catholique roumain.

La tradition des cantiques de la Nativité est très ancienne, remontant au 7e siècle, quand, selon un décret du concile de Tolède, des cantiques de louange annonçaient la solennité de la Nativité pendant l’octave qui la précédait.

Le mot roumain « colinde », dont l’étymologie remonte au terme latin « calendae » (d’où le mot « calendrier »), désigne l’équivalent du cantique de Noël spécifique au folklore traditionnel de Roumanie. Ce chant, le « colind », est interprété précisément par un groupe de chanteurs, une petite chorale, qui se déplace d’une maison à l’autre pour annoncer la Bonne Nouvelle, c’est « l’annonciation » de l’événement plein de grâce de la venue du Divin enfant.

Les Apôtres avaient été envoyés dans le monde pour annoncer l’évangile du Fils de Dieu, né d’une femme, et ressuscité. De la même façon, selon les coutumes roumaines, les chanteurs des « colindes» se déplacent pour annoncer aux autres l’avènement du Messie.

Ces « colindes» roumains sont, dans leur forme populaire, profondément ancrés dans la vie et le rituel liturgique de l’Eglise, tandis que cette coutume ancestrale est toujours présente chez les fidèles roumains, même dans le territoire de la diaspora.

La tradition des « colindes » reste ainsi une composante de la fête, une grande joie pour ceux qui chantent ces cantiques, mais également pour ceux qui accueillent dans la joie les chanteurs dont les efforts sont récompensés par des cadeaux symboliques. Cette belle tradition est d’ailleurs un renouvellement de l’appel de chaque baptisé d’être semblable aux anges et aux bergers de Bethlehem, c’est à dire un messager ou bien un apôtre de l’amour miséricordieux de Jésus pour le monde.

 

Quels est le symbole des chanteurs de « colindes »?​

La première signification du chanteur est l’ange. Les chanteurs rappellent les anges qui ont annoncé aux bergers la naissance du Sauveur. Les bergers qui ont tout de suite pris la route vers la crèche de Bethléem pour se prosterner devant le Nouveau-né. On pourrait encore dire que les chanteurs sont des missionnaires spontanés, des ambassadeurs de la Bonne Nouvelle.

 

Réveillez-vous, ne dormez plus !

Certains « colindes » commencent par un appel fort : « Réveillez-vous, réveillez-vous, grands seigneurs ! », ou « réveillez-vous, ce n’est pas l’heure de dormir! ». On dirait un appel initiatique aux échos d’appel biblique. D’ailleurs Jésus utilise lui-même cet appel : Réveillez-vous! Ce verbe transmet un mouvement, un changement, une metanoia, un réveil ou une résurrection.

 

De la même façon, le cantique du « colind » nous réveille, nous ressuscite.

 

 

+ Père Cristian Crisan,

Curé de la Paroisse gréco-catholique roumaine Saint-Georges de Paris

Syrie Al Safina l'arche

25 000 euros en 2017-2018 pour aider les foyers de l’Arche au Moyen-Orient

Depuis plusieurs années, l’Œuvre d’Orient soutient la communauté de l’Arche au Moyen-Orient. L’association, née en 1964, sous l’impulsion de Jean Vanier a créé des lieux où vivent et travaillent ensemble des personnes adultes en situation de handicap mental et ceux qui les accompagnent, les « assistants » salariés ou volontaires.

Chaque communauté de l’Arche est fondée sur trois dimensions : la dimension communautaire, la dimension professionnelle et la dimension spirituelle. Les communautés de l’Arche veulent témoigner des dons des personnes handicapées et changer le regard que leur porte la société. Elles veulent être des signes de paix et d’unité dans un monde divisé.

Au Moyen-Orient, l’Œuvre d’Orient soutient 5 communautés de l’Arche ; en Egypte (Minia, Alexandrie et le Caire), en Syrie (Damas) et en Palestine (Bethléem), par des allocations régulières. Ces allocations viennent soutenir le développement des communautés (actions nouvelles et extérieures) et la formation des « assistants ».

De juillet 2017 à juin 2018, 25 000 euros ont ainsi été attribués par l’Œuvre d’Orient aux communautés de l’Arche au Moyen-Orient !

 

Développement de l’Arche en Égypte :

À Al-Minya, capitale de la Moyenne-Égypte, l’Arche a monté la communauté Al Fulk. Le financement de l’Œuvre d’Orient a permis un appui au fonctionnement du centre, la co-animation d’un réseau de 15 associations impliquées dans la question du handicap, ou encore la mise en place de deux sessions internes de formation.

Au nord du pays, à Alexandrie, l’Œuvre d’Orient appuie le fonctionnement de la communauté baptisée Mog ElHob, la formation pour le suivi des familles, l’intervention d’un psychiatre, ou encore la formation.

 

Egypte Minia

 

Développement de l’Arche en Palestine :

À Bethléem a été créé un responsable du Développement, tourné vers la recherche de fonds et la fidélisation d’un réseau de donateurs, ainsi que la mise en place de réunions des familles des personnes accueillies afin d’adapter au mieux les actions à venir.

 

Développement de l’Arche en Syrie :

À Damas, le centre Alsafina accueille 8 personnes au sein d’un foyer de vie, et plus de 50 personnes dans un centre d’activités de jour. Le financement permet la prise en charge de la formation interne.

 

Notre but est de poursuivre en 2019 l’effort pour former, soutenir, élargir la mission de l’Arche. Dans le contexte actuel du Moyen-Orient, la formation reste un défi majeur pour consolider nos communautés. Aider leurs membres à avoir confiance dans la force du message qu’ils portent par leur vie quotidienne et qu’ils transmettent autour d’eux, est la meilleure façon de les soutenir.

Dans l’année qui vient, les dons collectés permettront de soutenir l’effort de formation humaine, spirituelle et professionnelle dans les communautés de l’Arche au Moyen-Orient, d’organiser une session régionale pour les assistants, de monter un atelier d’échange impliquant des jeunes autour de l’Arche Bethléem, et de développer dans chacun des lieux des actions envers les familles qui ont l’expérience du handicap.

Nous remercions chaleureusement l’Œuvre d’Orient pour son engagement aux côtés de l’Arche au Moyen-Orient, ainsi que chaque donateur. Merci de votre fidélité, qui rend possible ces initiatives essentielles pour la pérennité et le rayonnement de nos communautés dans des temps si troublés.

 

Syrie Al Safina l'arche  Syrie Al Safina l'arche  Syrie Al Safina l'arche

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les membres de l’Arche en Egypte, Palestine et Syrie

« De la violence à l’espérance, la seule issue possible : la charité » Conférence de Mgr Audo, évêque chaldéen d’Alep

À l’occasion de la messe annuelle de l’Œuvre d’Orient à Marseille le samedi 24 novembre, Mgr Antoine Audo, évêque chaldéen d’Alep a donné une conférence sur la situation en Syrie un peu plus tôt dans la journée. En voici quelques extraits :

 

                                                   

 

I. La violence de la guerre, ses effets après 8 ans de conflit

 

Je viens de Syrie, berceau du christianisme, où, aux portes de Damas, l’apôtre Paul rencontra le Christ et reçut le baptême des mains d’Ananie.

Je viens de Syrie où, à Antioche et à l’aube de l’annonce de l’Évangile, les premiers croyants reçurent le nom de « chrétiens ». Je viens de Syrie où, une belle mosaïque d’églises (orthodoxes, catholiques, protestantes), rites liturgiques (arménien, byzantin, syriaque, chaldéen, latin), de traditions théologiques et ethniques différentes, vivent ensemble et sont fiers de témoigner de leur foi au milieu d’une majorité musulmane et d’un peuple éprouvé.

Je viens de Syrie où la guerre, après 8 ans, a fait des millions de victimes. Nous pouvons compter sur une population de 23 millions :

° 5 millions de réfugiés dans les pays voisins (Turquie, Liban, Jordanie)

° 7 millions de personnes déplacées dans le pays

° 2 millions d’enfants non scolarisés

° 2 millions de personnes ayant émigré vers l’Occident

° plus d’un demi-million de personnes tuées

° des milliers de personnes mutilées.

 

Pour toutes ces raisons, je vous suis reconnaissant de pouvoir partager, en cette occasion qui nous est offerte, les préoccupations et l’espérance d’un pasteur qui vient d’Alep en Syrie, cette région si tourmentée et souffrante.

Ce qui se passe en Syrie depuis plus de 8 ans a toutes les caractéristiques du chaos : destructions, confusion, mystification de la réalité, et la liste peut s’allonger, avec le déni de la dignité humaine, des souffrances et des violences de toutes sortes, la corruption économique et morale… Tout le monde peut se rendre compte des effets négatifs d’une guerre.

 

Tout cela a engendré des faits visibles et documentés :

– Les principales villes syriennes ont été presque complètement détruites par les bombardements : plus de 60% des bâtiments à Alep et plus de 70% à Homs (deuxième et troisième plus grande ville de Syrie).

– La destruction de cinq cathédrales à Alep, arménienne, catholique et orthodoxe ; maronite, grecque catholique et syriaque catholique) ainsi que d’autres églises anciennes ;

– La destruction de la plus grande mosquée d’Alep et la plus ancienne de Syrie, ainsi que d’autres mosquées.

– 35 villages assyro-chaldéens détruits dans le nord-est du pays à la frontière avec l’Irak, auxquels s’ajoutent des villages irakiens de la plaine de Ninive, détruits auparavant, durant  la guerre en Irak.

–  Des attaques sur des lieux traditionnellement chrétiens (Maalula, Seydnaya, etc.) où la langue araméenne (langue parlée par Jésus) est encore présente.

– La destruction de sites archéologiques tels que Palmyre, Der ez Zor, Mar Semaan (Saint Siméon),  Raqqa.

– L’enlèvement de deux évêques orthodoxes ; l’assassinat de plusieurs prêtres et de deux imams ayant exprimé leur désaccord à propos de la violence des extrémistes ; ainsi que l’assassinat du fils du mufti de Syrie, en raison de son soutien au gouvernement syrien.

 

 

II. De la violence à l’espérance, la seule issue possible : la charité

 

En ce qui concerne ce point, en tant que chrétien, je ne peux qu’entrevoir les chemins d’espérance qui se sont ouverts grâce au témoignage de charité de nombreux croyants de toutes les Eglises chrétiennes en Syrie, aidés par le soutien de la communauté chrétienne internationale. Tous se sont mis au service de la population la plus souffrante : personnes déplacées, enfants, personnes âgées, nouveaux pauvres.

Caritas, JRS (service jésuite de réfugiés), GOPA (Caritas orthodoxe), sont les principales organisations caritatives chrétiennes, compte tenu de l’impossibilité de la présence d’ONG internationales (c’est regrettable, mais ces dernières sont de plus en plus politisées) dans les territoires contrôlés par le gouvernement actuel. Ces organismes réalisent le travail de véritables associations humanitaires, répondant aux besoins de toute la population, sans distinction ethnique ou religieuse, à travers des projets d’aide matérielle, de distributions de nourriture, de services médicaux, d’aides scolaires, de soutien psychologique, de formation professionnelle pour les jeunes (chrétiens et musulmans). Des projets de reconstruction de logements et des projets d’aide aux personnes âgées, en référence à un projet né dans notre église chaldéenne à Alep, avec la collaboration d’une association catholique de Florence (AGATA-SMERALDA) et le soutien régulier et efficace de l’Œuvre d’Orient depuis un an. Certains espaces ont été aménagés pour accueillir les personnes âgées seules, leur permettre de se rencontrer socialement et de faire face à la fatigue des années de guerre grâce à un lieu de rencontre.

 

En plus de ces principales organisations, nous pouvons également trouver :

– des comités de bienfaisance, chrétiens, relatifs à chaque Eglise ;

–  17 groupes de scouts uniquement à Alep, pour le regroupement des jeunes ;

-la Communauté de vie chrétienne (CVX) les Equipes Notre-Dame, des groupes franciscains, salésiens et maristes.

 

En outre, nous rencontrons des associations de laïcs dans le secteur de la santé, particulièrement centrées sur l’aide aux familles des migrants et à leurs proches et sur la solidarité entre voisins.

Toutes ces manifestations dont nous sommes témoins nous  apparaissent comme un véritable miracle de transformation et d’ouverture.

Sur ce chemin d’espérance, nous pouvons encore mentionner des initiatives de solidarité venant de l’extérieur de la Syrie, de nombreuses initiatives de prière, de solidarité, de collectes de fonds dans de nombreuses paroisses, diocèses et associations ecclésiales, nous faisant sentir que nous n’étions pas oubliés mais faisant partie d’une grande communauté dont les frontières ne coïncident pas avec celles des nations. Premièrement, l’excellent travail de collaboration coordonné par Caritas Internationalis, qui implique principalement des Caritas nationales de toute l’Europe, des États-Unis, du Canada et de l’Australie, suffit à penser que la plupart des projets d’urgence en Syrie ont été soutenus et financés par le biais des canaux Caritas et JRS.

L’initiative du nonce apostolique en Syrie, le cardinal Mario Zenari, a favorisé, grâce à des contacts et à une collaboration avec l’AVSI (association internationale de volontaires), la prise en charge des trois hôpitaux catholiques en Syrie, deux à Damas et un à Alep, ouverts à tous sans distinction d’appartenance politique ou religieuse. Dans un pays en grande détresse du fait de l’embargo, du coût élevé des soins médicaux et des médicaments ainsi que de l’émigration du personnel médical, cette aide constitue une véritable lumière dans les ténèbres.

 

 

L’un des devoirs que je ressens en tant qu’évêque d’une minorité de la minorité chaldéenne en Syrie est donc de développer deux idées qui me sont chères et qui sont enracinées dans les déclarations du concile Vatican II.

La première est la suggestion faite par le Conseil à tous les membres de l’Église de penser que leur présence dans le monde musulman est une dynamique de communion, d’abord entre les chrétiens eux-mêmes, puis entre chrétiens et musulmans. L’expression « Ensemble, devenir chrétiens » peut nous guider dans un dialogue œcuménique qui cherche l’unité à la suite du Christ, afin d’être des disciples envoyés dans le monde comme les apôtres pour proclamer la bonne nouvelle de l’Évangile : « Tu es Bien aimé de Dieu, n’aie pas peur « .

Deuxièmement, avec les différents groupes de musulmans, je souhaite approfondir l’expression « ensemble pour devenir citoyens« , tâche difficile, mais que les chrétiens du Moyen-Orient s’efforcent de promouvoir dans l’espoir d’une plus grande liberté de religion et d’un plus grand respect des différences.

Sur ces deux niveaux de vie en commun, nous l’avons déjà mentionné, dans cette Syrie touchée par la violence, les chrétiens ont été en mesure de donner un exemple remarquable de solidarité et de service auprès des plus démunis, sans discrimination. Cela a attiré l’attention et le questionnement des musulmans face à la foi des chrétiens.

Je pourrais citer des dizaines de témoignages de remerciement et de gratitude de la part des musulmans, en particulier de ceux qui ont été aidés à faire face à des opérations médico-chirurgicales, mais, à titre d’exemple, je me limiterai à un témoignage qui m’a particulièrement touché.

Un pauvre vieux musulman accroupi contre le mur de l’église chaldéenne où se trouve le bureau syrien de Caritas, alors qu’il attendait le sac de nourriture, me voyant passer avec la soutane et la croix pectorale autour du cou, se leva subitement devant les personnes qui faisaient la file, tous musulmans, et il se mit à dire à haute voix: « Maintenant, nous savons qui sont les chrétiens ! C’est de l’or pur, pas du toc ! »

Pour moi, c’était comme un geste prophétique, qui reste dans mon cœur et dans ma conscience. Un signe d’espérance indélébile pour les chrétiens, un signe d’espérance dans un enfer de violence.

 

 

III. Les conséquences de la guerre sur les familles

 

Si la guerre a des conséquences sur le tissu social, elle en a en tout premier lieu sur les familles. Nous allons analyser cela simplement.

 

1) Tout d’abord, il faut souligner que la famille est vraiment le point d’appui de la société syrienne. Le point de référence de l’individu est toujours le noyau familial. Et quand la famille directe (les parents) n’est pas impliquée ou présente, nous remarquons qu’elle est aussitôt remplacée par la parenté la plus proche : oncles, tantes, grands-parents, etc.

Nous insistons sur cet aspect, parce que si la Syrie n’a pas été complètement détruite dans son tissu social, après huit ans de cette guerre horrible que nous connaissons tous, c’est grâce à la solidité des liens familiaux.

 

2) Pour cette raison, nous pouvons dire que la famille est perçue comme un lieu sacré, où se révèlent la générosité et la bénédiction de Dieu. Il se peut que l’empreinte tribale de la société syrienne soit à la base de cette perception de la famille, mais il est impensable de soutenir que cet élément primitif et négatif de la tribalité soit à éliminer pour que le pays puisse entrer dans la modernité. En effet la dimension familiale révèle également qu’il est possible de vivre le progrès puisque la Syrie, sous différents aspects, est déjà un pays moderne qui ne perd pas pour autant sa propre identité, ni certaines valeurs sur le sens profond de notre humanité, valeurs qui ne sont pas seulement chrétiennes mais sont enracinées dans l’esprit de fraternité, d’une vie de communion réelle, d’une solidarité envers les plus faibles, dans des rapports de réciprocité et de gratuité.

 

3) Il y a donc une solidité de la vie de famille qui fait que nous ne pouvons être entièrement abandonnés à nous-mêmes. La famille empêche l’aliénation individualiste qui semble de plus en plus caractériser les sociétés européennes.

Cette valeur fait que, malgré la guerre et la dispersion des familles aux quatre coins du monde, la solidarité se maintient entre tous. Les enfants, à l’étranger, cherchent à soutenir leurs parents restés au pays, malgré les difficultés auxquelles ils peuvent être eux-mêmes confrontés. Les parents, de leur côté, aident leurs enfants à se construire un avenir, même dans un pays lointain. Malgré la séparation, les liens familiaux restent très forts !

 

4) L’une des conséquences de cette guerre sur les familles, chrétiennes ou musulmanes, est la déchirure du tissu social compromettant sérieusement la possibilité d’une reconstruction de l’avenir.

Beaucoup de jeunes, et surtout les jeunes filles, souffrent de l’impossibilité actuelle de pouvoir fonder une famille. C’est une sorte d’échec personnel, cette incapacité à se réaliser en tant que personne. Ces jeunes ont l’impression d’avoir manqué leur vocation qui devrait leur assurer la confiance dans l’avenir et la confiance en eux-mêmes.

L’un des risques de la situation est notre impuissance à résister à la destruction, ce qui affaiblira encore davantage le tissu familial. La Syrie est très affaiblie par la migration des jeunes et des éléments les plus riches et les plus cultivés du pays.

 

5) Pour cette même raison, nous devrions apporter plus d’attention aux familles, parce que celle-ci est le fondement indispensable au développement et à la croissance de la société, malgré toutes les difficultés pour les soutenir efficacement dans ce monde globalisé. La Syrie d’aujourd’hui semble précisément mettre en lumière les limites et les contradictions du monde actuel.

Enfin, nous avons besoin, en Syrie, d’une réflexion sérieuse sur des projets capables de soutenir les familles et surtout les jeunes afin que naissent de nouveaux foyers pouvant contribuer au maintien du tissu social syrien et tout particulièrement chrétien.

L’Œuvre d’Orient se réjouit de la beatification des moines de Tibhirine.

Elle s’unit à la prière des chrétiens d’Algérie pour la béatification des martyrs.

L’engagement de ces hommes et de ces femmes stimulent l’action de l’Œuvre pour la paix dans les pays.

L’Œuvre d’Orient s’associe à l’action de grâce des pères blancs pour la fondation de leur ordre par le Cardinal Lavigerie qui fut également le premier directeur de l’Œuvre d’Orient.

 

Retrouvez des extraits du témoignage de Christian de Chergé

«S’il m’arrivait un jour – et ça pourrait être aujourd’hui – d’être victime du terrorisme qui semble vouloir englober maintenant tous les étrangers vivant en Algérie, j’aimerais que ma communauté, mon Église, ma famille, se souviennent que ma vie était DONNÉE à Dieu et à ce pays. Qu’ils acceptent que le Maître Unique de toute vie ne saurait être étranger à ce départ brutal. Qu’ils prient pour moi : comment serais-je trouvé digne d’une telle offrande ? Qu’ils sachent associer cette mort à tant d’autres aussi violentes, laissées dans l’indifférence de l’anonymat. Ma vie n’a pas plus de prix qu’une autre. Elle n’en a pas moins non plus » […]

« Cette vie perdue totalement mienne et totalement leur, je rends grâce à Dieu qui semble l’avoir voulue tout entière pour cette JOIE-là, envers et malgré tout. Dans ce MERCI où tout est dit, désormais, de ma vie, je vous inclus bien sûr, amis d’hier et d’aujourd’hui, et vous, ô mes amis d’ici, aux côtés de ma mère et de mon père, de mes sœurs et de mes frères et des leurs, centuple accordé comme il était promis ! Et toi aussi, l’ami de la dernière minute, qui n’aura pas su ce que tu faisais. Oui, pour toi aussi je le veux ce MERCI, et cet «À-DIEU» envisagé de toi. Et qu’il nous soit donné de nous retrouver, larrons heureux, en paradis, s’il plaît à Dieu, notre Père à tous deux ».

 

Copyright Philippe Demenet – Visuel : « Tibhirine », acrylique sur toile, 73×100 – en hommage aux sept martyrs du monastère de Tibhirine, à l’occasion de leur prochaine béatification.