Voici le témoignage de fin de mission de Maxime, 30 ans, ingénieur agricole qui est parti servir les personnes polyhandicapées au Centre Anta Ahki, à Beyrouth pour 6 mois.
Premier épisode, car on ne peut pas réchapper à la fièvre de l’Orient qu’on attrape inconsciemment au coin d’un souk plein de vie, sur la plage face à la lumière orangée d’un coucher de soleil ou seulement après une rencontre avec un libanais souriant. Cette fièvre, je le sais, elle me suivra longtemps et m’incitera à revenir dans d’autres circonstances aux pays du Levant.
Le temps est passé si vite. Je comptais les jours restants et courrais derrière les derniers souvenirs.

Mon dernier mois, j’ai conclu ma mission au sein de l’unité communication et projets en construisant des projets suites à des remontées de besoins du foyer. Je les traduisais sur des supports attractifs à destination de potentiels bailleurs. Un projet pouvait correspondre à une demande de financement pour couvrir les frais de chauffage, d’installations de panneaux solaires ou encore de thérapies innovantes à destination des jeunes. J’ai apprécié cette facette du foyer, nettement différente mais indispensable à la recherche de fonds et donc au bon fonctionnement du foyer. Cela m’a ainsi permis d’être stimulé intellectuellement, de rendre service autrement et de mettre à contribution mes compétences professionnelles.
Mon rôle de volontaire
Comprendre le rôle d’un volontaire a été tout un cheminement à faire dans mon esprit.
Au départ, tu te dis je pars faire de l’humanitaire, sauver des gens. Sauf qu’arrivé sur place, la réalité est assez différente. Tu réalises vite que la vie n’est pas toute rose. Tes actions peuvent être 
Ma vision est que le volontaire est une personne multitâche faisant office de couteau suisse :
-Il remonte le moral par son rire, son sourire, sa parole, son écoute ou encore ses gestes. Il apporte son dynamisme, son énergie à des gens qu’ils les ont presque perdus à force d’espoirs envolés. En effet, le climat libanais est de moins en moins propice à des scènes de liesse, et chaque moment de joie compte.
-Il aide partout où il peut aider, à son échelle, dans son lieu de mission.
-Il est aussi l’ambassadeur d’une identité, d’une culture, d’une foi qu’il partage allègrement. C’est d’ailleurs dans ces moments que l’on se sent le plus français. Cette expérience me fait prendre conscience de la chance que j’ai d’avoir l’assurance d’une vie confortable à mon retour et d’être né dans un pays de droits où l’on peut vivre dignement. Ici le salaire moyen est insuffisant pour payer le coût de la vie. Le concept des cinq semaines de congés payés leur est étranger. Les aides de l’état sont absentes. L’accès aux droits fondamentaux tels que les soins, l’électricité, l’eau potable, l’école, est extrêmement limité.
Les fruits de ma mission
Cette mission m’a beaucoup apporté, ce fut une expérience profonde au sein du foyer qui marque et qui te guide pour l’avenir.

-Ce chemin de vie m’a appris à m’abandonner entièrement à l’autre, à apprendre à écouter patiemment. Ma technique : jouer à s’apprivoiser constamment à l’aide du jeu du petit prince et du renard. Chaque jour, je me suis assis un peu plus près sans parler. Au bout d’un temps, l’autre s’ouvre et te rend au centuple ce que tu lui donnes par ses sourires et ses mercis.
– ll m’a permis également de gagner en patience, en humilité et en diplomatie car à certains moments, ce n’était pas non plus une partie de plaisir. Comme par exemple, avoir régulièrement des douleurs au dos à force de porter les jeunes plusieurs fois par heure ou accepter de dormir peu car on te réveille en moyenne 4 à 5 fois par nuit pour un besoin, ce n’est pas évident mentalement. Ou encore accepter la critique car chaque jeune a son caractère. Certains peuvent se mettre en colère contre toi car tu as fait quelque chose de travers. Tu as envie de répliquer de la même manière, surtout quand la fatigue se fait sentir, sauf que tu te retiens et réponds avec douceur. De plus, le rythme est lent face à des personnes âgées atteintes d’handicap conséquent, et les journées sont parfois très longues. Malgré tes mille idées en tête, tu dois souvent te restreindre et prendre ton mal en patience.
-Enfin, il m’a donné un regard plus juste du handicap, que j’observais auparavant de loin. Le handicap devient secondaire. Maintenant, je vois avant tout la personne et l’ami(e). De plus, ce qui m’a frappé et fasciné, c’est leur force d’âme surprenante qu’ils ont construites au fil des années. Chacun a son 
Finalement, ce que j’ai préféré c’est que l’on met l’humain avant toute chose. Chaque membre de la maison est soucieux et veille à ce que tu ne manques de rien, tout en multipliant les formules de politesse de bienvenu. Il y a en permanence des moments de fêtes, de rencontres permettant de créer ce lien qui nous unit.
J’ai admiré toutes les personnes parce qu’elles ne perdent pas espoir, parce ce qu’elles gardent cet accueil cher aux libanais et l’amour pour l’autre malgré toutes les difficultés.
Le Liban, un pays qu’il faut défendre
J’ai eu la chance d’avoir été envoyé dans ce pays. Le Liban est si attachant. Un pays qu’il faut défendre.
Parce qu’il est beau, une oasis au sein du croissant fertile.
Parce qu’il est bruyant par sa multi culturalité et foisonnant de vie.
Parce que les libanais sont formidables et accueillants, des personnes attachées à l’idée de liberté qui aiment la vie et qui pleurent quand ils assistent à la montée de l’intégrisme.
Parce que le Liban incarne un vivre ensemble dans cette région du monde.
Parce que la France et Liban ont des liens profonds, une histoire commune, ce qui explique pourquoi 50% des libanais seraient étonnamment francophones.
Ce pays est maintenu à flot par sa population, ses ONG et ses communautés pourtant toutes menacées par la crise. Au gré des rencontres, j’ai surtout été ébahi par la force de ces
En conclusion, ce fut beau. Une succession de situations improbables, de rencontres, de moments de partage et de convivialité. Je repars avec un lien très fort à ce foyer et ce pays, avec des souvenirs pleins la tête, avec une profonde amitié pour les autres volontaires, avec ce regard d’amour sur le handicap, avec plus d’humilité et un beau message de vivre ensemble. Cette expérience me guidera pour les prochaines années dans mon savoir-être et mon orientation professionnelle. J’espère qu’à l’avenir je continuerai à consacrer du temps au service des autres car, au-delà de te sentir utile, être tourné vers l’autre revêt dorénavant pour moi une composante essentielle d’un épanouissement personnel.
Yatikon el a3fié ([1])
MAXIME SUBRA DE SALAFA
[1] Que Dieu vous donne la force
« Ces ambulances vont sauver beaucoup de vie » Mgr Borys Gudziak
L’expérience de la fraternité
A l’hôpital, je me sens de plus en plus proche de l’équipe des soignants. Que ce soit avec les infirmières, qui sont toujours curieuses de savoir que ce que j’ai fait le week-end précédent et avec qui je peux discuter de tout et de rien (mais particulièrement de nos familles respectives, car c’est ce qu’elles préfèrent). Mais aussi avec les aides-soignants. Avec eux c’est un peu plus particulier car ils ne parlent pas français, et très peu anglais. La communication se fait donc avec les gestes, les sourires, les quelques mots respectifs que l’on connaît, en arabe pour ma part, et en français pour eux. Mais malgré cette communication verbale moins riche, je me sens tout aussi proche d’eux et suis aussi contente de les retrouver que de retrouver ceux avec qui je peux parler ! J’ai aussi créé de vrais liens d’amitié avec les internes qui vivent comme nous au sein de l’hôpital. Nous pouvons nous retrouver le midi aux pauses déjeuners, ou le soir après nos journées de travail ! Cela pourrait paraître être un point négatif de vivre sur son lieu de travail, mais finalement, en ayant ses amis sur place, ce n’est que du positif (surtout le matin, ou je peux me lever à 7h15 pour commencer à 7h30). Au niveau professionnel, ma présence avec les patients est minime étant donné que je ne suis pas là tout au long de la journée. Mais comme je l’avais déjà écrit, j’ai compris que ma présence était plus importante au niveau de l’équipe !
Le samedi soir, était le soir de fête ! Nous l’avons fêté à Sainte-Cécile, avec les sœurs de plusieurs communautés venues se joindre à nous, ainsi que quelques volontaires que j’avais convié à venir ! Après la messe, chacun venait vers l’autre en disant « al messih kam » (Il est ressuscité!) et à l’autre de répondre « ahkan kam »(il est vraiment ressuscité!). Nous avons ensuite partagé un trèèès bon repas avec tout le monde (photo à l’appui) En plus, avec Yolande nous avons été gâtés de chocolats!!! (photo également à l’appui) par nos chères sœurs qui nous font toujours aussi rire pour certaines et avec qui on aime toujours autant avoir des discussions avec d’autres. Ahkan kam, c’était un très joyeux week-end de Pâques !
les manifestations qui pouvaient avoir lieu en automne derniers se sont calmées. Peut-être est- ce à cause du froid me direz-vous. En effet, cette année, le Liban a connu une vague de froid sans précédent. Les tempêtes de neige se sont succédées paralysant la moitié du pays et entraînant la fermeture d’un grand nombre d’écoles dans l’incapacité de pouvoir recevoir leurs élèves dans des bâtiments non chauffés et sans électricité en raison de la hausse du prix du pétrole. Bien évidemment le Covid a lui aussi accéléré les fermetures. Dans un pays où le système de santé tombe en décrépitude, les Libanais vivent dans la crainte de tomber malade et de se retrouver étranglés financièrement par des frais médicaux exorbitants.
Le 14 février dernier, à l’occasion de la Saint Valentin sœur Rita a organisé un jeu pour les personnes du quartier. Au programme roue de la fortune, danses et chants animaient la rue pour la plus grande joie des passants.
la Communauté des Béatitudes dans la préparation d’un week-end retraite pour un groupe de Libanais ainsi que les volontaires de l’Oeuvre d’Orient. Un moment propice pour se ressourcer dans ce chemin vers Pâques. Ces deux jours passés à Taanayel dans le monastère des jésuites ont permis de se retrouver loin de l’agitation de Beyrouth, en plein campagne et de vivre des beaux moments tous ensemble.
Il y a deux semaines, nous avons profité d’un week-end de trois jours pour partir avec huit autres volontaires aider Abuna Abdallah, frère capucin, dans la rénovation d’un internat détruit pendant la guerre. Au programme : peinture, déblaiement de gravas, feu de joie, autant d’activités qui n’ont pas manqué de me rappeler le confinement à la maison. Ce sont surtout à travers ces moments de simplicité et de travail que je réalise la grâce d’avoir rencontré tous ces volontaires qui sont une composante à part entière de mon volontariat tant part les activités que nous entreprenons ensemble que par les belles discussions que nous avons.
« Pour n’être pas changés en bêtes, ils s’enivrent
au bruit, à la négoc… Mais on reste interdit par la beauté des montagnes, par la joie des enfants, par les merveilles qui font déborder le cœur, par l’amour des libanais pour la vie. C’est une belle faculté humaine !
J’ai cette chance merveilleuse de pouvoir être avec chaque enfant un grand frère, qui ne leur demande rien, n’exige rien d’eux, et ne voit en eux personne d’autre que la personne qu’ils sont maintenant. Quelle étonnante expérience, et tellement formatrice, d’être pour une année seulement avec des enfants pour qui je ne dois être rien d’autre qu’une présence aimante, les encourageant à faire de même entre eux. C’est ma force, ma conviction, mon horizon quand je doute, que je me sens inutile, seul, bien démuni de toute compétence…

du double de mon âge.