Communiqué de presse : Alors que le couloir de Latchine est une nouvelle fois bloqué, L’Œuvre d’Orient condamne avec la plus grande fermeté cette atteinte à l’intégrité du Haut-Karabagh.
Le 12 décembre 2022, un groupe qui semble animé par les autorités azerbaïdjanaises a bloqué la route de Goris à Stepanakert, dans le Haut-Karabagh. Il s’agit de l’unique route, le corridor de Latchine, qui relie le Haut-Karabagh à l’Arménie, et donc au monde extérieur.
Ce blocage vise à couper la région du reste du monde et à plonger la population du Haut-Karabagh dans une situation d’urgence humanitaire. Leur droit à la vie, à la sécurité, aux ressources vitales et à la libre-circulation est foulé aux pieds par l’Azerbaïdjan.
Bakou bafouerait ainsi une nouvelle fois les Droits de l’homme ainsi que ses engagements pris lors du cessez-le feu du 9 novembre 2020.
L’Œuvre d’Orient condamne avec la plus grande fermeté cette nouvelle atteinte à l’intégrité du Haut-Karabagh. Elle appelle à un sursaut de la communauté internationale. Il est en particulier urgent que les autorités françaises rencontrent les représentants du Haut-Karabagh et nouent enfin un dialogue approfondi avec elles.
Sans une réaction internationale immédiate, l’issue pourrait être fatale à terme pour les 120 000 Arméniens du Haut-Karabagh.
Découvrez le témoignage de notre volontaire Lucie, qui est en mission à Kusseia au sein du dispensaire des Filles de la Charité.
Lorsque l’on demande à un Egyptien comment il se porte, la réponse est bien souvent « Hamdulla », ce qui signifie « Grâce à Dieu » et témoigne de sa gratitude envers le Seigneur qui lui accorde la santé et la joie. Il accepte de ne pas être maître de toutes ses émotions et s’en remet à Dieu. Il m’a fallu quelques semaines de mission pour réaliser l’importance de ce lâcher-prise à l’orientale : à
contre-courant de notre mentalité occidentale où chaque jour est minutieusement orchestré, et ce des semaines en avance, les Egyptiens se laissent davantage porter par les évènements. Cet état d’esprit est un bon modèle durant nos missions où il est impossible de tout contrôler ; on apprend à vivre au jour le jour et avoir confiance en la Providence.
J’ai commencé ma nouvelle vie au sein de la communauté des Filles de la Charité de Qusiya, près d’Asyut, le 5 septembre. Les quatre sœurs (Sœur Nada, Sœur Nadia, Sœur Camilla et Sœur Férial) m’ont accueilli avec toute l’hospitalité et la bienveillance égyptienne. Venant du Liban, de Syrie, ou bien originaires de Haute-Egypte, ces femmes ont choisi de consacrer leur vie à suivre les enseignements de Saint Vincent de Paul dont la ligne directrice est le service des pauvres. Les Filles de la Charité sont disséminées dans près de 100 pays et œuvrent principalement dans le domaine de l’enseignement et du soin. A Qusiya, les sœurs mènent de très nombreux projets sans cesse renouvelés et enrichis : un dispensaire offrant un accès à des consultations et à des soins à bas prix pour les populations démunies, un jardin d’enfant (équivalent à la maternelle), un programme de soutien scolaire pour des enfants décrocheurs du quartier, des cours de catéchisme…
Mon travail au dispensaire
J’ai été envoyée par l’Œuvre d’Orient avec pour mission principale de travailler au dispensaire. Les patients peuvent y trouver des consultations médicales abordables (généraliste, dermatologue, ORL, pédiatre, ophtalmologue) ainsi que des soins infirmiers (pansements, piqûres…).
Le déroulement de ma mission a évolué peu à peu depuis mon arrivée début septembre. Durant le premier mois, le temps de m’acclimater et d’apprendre quelques mots d’arabe, je travaillais tous les jours à l’infirmerie du dispensaire en compagnie de ma co- volontaire Agnès et de l’infirmière responsable Um Abram. Nous soignons un grand nombre de brûlures, d’infections cutanées et oculaires causées par la poussière, de blessures dues à des accidents de tuk- tuk.
Cela fait à présent quelques semaines que je travaille également trois jours par semaine avec le médecin généraliste. Avant l’arrivée du médecin vers 11h, je reçois les patients un par un pour prendre leurs constantes et ainsi optimiser la durée de la consultation à venir. Je suis capable de leur demander de manière simple ce dont j’ai besoin, mais j’ai encore du mal à comprendre ce qu’ils cherchent à me dire, alors lorsqu’ils ont des questions, je me contente pour l’instant de leur dire qu’ils pourront les poser dès qu’ils verront le médecin. Au cours des consultations, le médecin me traduit en anglais les points importants et me laisse examiner certains patients, notamment les musulmanes qui sont plus à l’aise d’être examinées par un femme.
Les autres facettes de ma mission
Better Life est un projet mené par les sœurs pour donner à une soixantaine d’enfants pauvres du quartier un complément d’éducation et des repas équilibrés. Du lundi au jeudi, les enfants de 6 a 12 ans sont accueillis par petits groupes et encadrés par de jeunes enseignantes ; ils font du renforcement scolaire, des exercices supplémentaires pour essayer de les maintenir dans le système scolaire le plus longtemps possible sans décrochage. Une cuisinière dédiée à ce programme leur prépare chaque jour un repas chaud avec de la viande, des légumes et des féculents.
Agnès et moi passons dans chaque classe quelques heures après le déjeuner pour distribuer un goûter à tout le monde. Les enfants sont parfois en grande difficulté sociale, et on les voit s’épanouir au fur et à mesure des années. Nous allons aussi souvent les voir de 12h a 12h30 pendant leur pause avant le repas : nous leur proposons de petites activités pédagogiques pour les occuper. Ils sont très affectueux et enthousiastes dans les jeux que nous leur proposons ! En ce moment, nous leur apprenons les parties du corps en français avec une chorégraphie sur « Jean Petit qui danse ».
Nos matinées sont occupées par le dispensaire. Dans l’après-midi, les activités varient ; nous avons deux projets fixes, le mardi et le mercredi, et les autres jours sont la plupart du temps remplis par des projets ponctuels que nous confient les sœurs.
Le projet du Mardi se déroule dans la petite ville mitoyenne d’Arafazara. Un groupe de femmes se retrouve chaque semaine pour prier et assister à une conférence menée par une sœur. Notre rôle est de nous occuper de leurs enfants, entre 10 et 15) pendant ces quelques heures. Nous varions les activités : origamis, coloriages, Frisbee…
Le Mercredi, nous rendons visite à Mme Rosine, une ancienne maîtresse du jardin d’enfant chez les sœurs qui vit seule à Qusiya. En plus de prendre sa tension et de lui faire sa piqûre hebdomadaire, nous lui tenons compagnie pendant 1h pendant laquelle elle nous raconte son enfance et ses année au jardin d’enfant.
Le point Spi
Je commence chaque journée en assistant à la messe de rite copte catholique en arabe, qui dure une demi-heure. Même si la liturgie est assez différente du rite latin, on retrouve dans les grandes lignes les mêmes éléments et je peux suivre à l’aide d’une traduction en français.
A 19h, nous disons les vêpres avec la communauté, cette fois-ci en français. La messe du dimanche est à la paroisse du quartier : elle dure environ 1h30 et est entièrement psalmodiée.
En conclusion de cette première newsletter, voici le 40ème verset du 25ème chapitre de l’Evangile selon Saint Matthieu :
« Je vous le dis en vérité, toutes les fois que vous avez fait ces choses à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous les avez faites. »
Venez découvrir le témoignage de notre chargée de mission, qui nous raconte les coulisses de son reportage sur la jeunesse syrienne. 14 ans après son premier voyage, elle nous dévoile comment les jeunes se mobilisent pour la reconstruction.
Le reportage est à retrouver dans le Bulletin n°809 Grand angle « Syrie » (parution décembre 2022). Pour s’abonner au Bulletin de L’Œuvre d’Orient, cliquez ici.
19 novembre 2022, rencontre du pape François avec le catholicos Mar Awa III, patriarche de l’Église assyrienne d’Orient.
Le 19 novembre 2022, en la bibliothèque privée du palais apostolique, le pape François a reçu le catholicos Mar Awa III, responsable de l’Église assyrienne d’Orient. Patriarche qu’il avait déjà rencontré lors de la célébration eucharistique à Erbil au cours de son voyage historique en Irak (mars 2021). Dans son discours, le pape François s’est félicité du chemin parcouru – syn-odos « chemin commun » – entre les deux Églises, rappelant notamment la Déclaration christologique commune signée par Jean-Paul II et le patriarche Mar Dinkha IV (1994) ou sa propre rencontre avec le patriarche Mar Gewargis III, à Rome en 2018, et la signature commune d’une Déclaration sur la situation des chrétiens au Moyen-Orient. Région du monde encore blessée aujourd’hui par la violence, l’instabilité et l’insécurité, a souligné plus loin le pape François, et où « un grand nombre de nos frères et sœurs dans la foi ont dû quitter leurs terres ». « Beaucoup luttent pour y rester et je renouvelle avec Votre Sainteté l’appel pour qu’ils jouissent de leurs droits, en particulier de la liberté religieuse et de la pleine citoyenneté », a-t-il déclaré.
Dans la suite de son discours, le pape François a tenu à remercier le catholicos Mar Awa III « d’avoir donné voix au désir de trouver une date commune pour que les chrétiens fêtent ensemble Pâques ». Et de reprendre les propos du pape Paul VI en son temps : « nous sommes prêts à accepter toute proposition faite ensemble ». De fait, a-t-il développé, l’année 2025 sera « une année importante », non seulement parce que sera célébré l’anniversaire du premier concile œcuménique (Nicée), mais aussi « parce que nous célébrerons Pâques à la même date ». Alors, a-t-il affirmé, « ayons le courage de mettre fin à cette division, qui parfois fait rire : “Ton Christ, quand est-ce qu’il ressuscite ?” » « Le signal à donner est le suivant : un seul Christ pour nous tous », a relevé le pape François.
Découvrez le témoignage de Danaé, qui est en mission à Jérusalem au sein du centre Sainte Rachel.
Mardi 20 septembre 2022. 10h. Ça y est, c’est le grand départ ! Avec Quiterie, ma partenaire de mes trois dernières années d’études en psychomot’, nous voilà vraiment lancées dans l’aventure du volontariat. Petite larme en quittant la famille, yeux brillants en arrivant, nous sommes fin prêtes pour cette nouvelle année bien spéciale.
L’arrivée
Nous avons eu de la chance, aucun soucis avant, pendant, et après notre vol. Nous avons rapidement passé la douane, récupéré nos VISA pour un an et retrouvé nos grosses valises. Nous nous quittons à l’aéroport. Quiterie part en voiture avec deux soeurs de la communauté des Filles de la charité. Elle sera, à Ein Karem (ouest de Jérusalem) dans un centre accueillant des enfants, adolescents et jeunes adultes polyhandicapés.
De mon côté, je prends directement le train en compagnie de Sister Anusha. 20 minutes de l’aéroport jusque’à la Central Station de Jérusalem. Puis le bus (quelle galère avec une grosse valise). Le centre est en haut de la Pinsker Street, l’arrivée est largement appréciée ! Je découvre rapidement ma nouvelle maison et rencontre les volontaires. Mercredi sera réservé à la visite du centre, à la rencontre avec la directrice et tous ceux qui travailleront avec moi ou que je côtoierai pendant les 10 prochains mois.
Le Centre Sainte Rachel
Le Centre Sainte Rachel abrite une crèche, ouverte en 2014, un after school program (2016) et un foyer appelé Maison de l’Ange Gardien (2018). Il est géré par le Patriarcat Latin de Jérusalem. Le centre se situe depuis 2016 sur un terrain des frères Capucins dans un quartier résidentiel plutôt huppé de Jérusalem, à 20 minutes à pieds de la Vieille Ville.
Je travaille à la crèche. Celle-ci accueille 25 enfants de 6 mois à 3 ans, répartis entre les babies, les moyens et les grands. Ces enfants sont tous issus de familles de migrants, demandeurs d’asile ou réfugiés, parfois même sans papiers. La crèche a donc pour mission d’accueillir ces enfants éthiopiens, érythréens, philippins, sri-lankais, qui, pour la plupart vivent en situation de précarité : légale, sociale, affective et familiale, matérielle et économique, psychologique, spirituelle et religieuse, éducative. La crèche offre alors un lieu sûr et stable, pour garder les enfants pendant les journées de travail des parents. Je travaille la plupart du temps avec les babies, mais je tourne parfois lorsqu’il y a besoin d’aide sur un autre groupe.
Avec une autre volontaire, Marie, éducatrice spécialisée, nous nous sommes penchée sur la lecture du projet pédagogique. Mis à jours pour la dernière fois en 2021. Nous avons pour mission de le mettre à jour et de continuer ce travail constant de formation des équipes, de remise en tête des points importants concernant la petite enfance pour toujours chercher à améliorer les pratiques et habitudes de la crèche. Tout un programme !
Les volontaires
Les volontaires vivent dans une maison sur le lieu même du centre. Nous sommes actuellement 6 dont 4 françaises ! Je suis la seule de l’Oeuvre d’Orient. Marie et Juliette viennent de la DCC (Délégation Catholique pour la Coopération). Béatrice, française et Ali, américaine viennent toutes deux sans association. Paula est allemande et vient avec la FIF (Fachstelle Internationale Freiwilligendienste). Nous sommes toutes là pour 10 mois voire 1 an pour certaines. Elles sont arrivées avant moi, entre début juin et mi septembre. J’ai eu le temps de croiser Veronika et Salome, deux volontaires respectivement hongroise et allemande qui ont fini leur mission. J’ai d’ailleurs commencé à apprendre l’hébreu avec Paula, Juliette et Béatrice, pas facile !
Les visites
J’ai eu de la chance dès mon arrivée de pouvoir profiter de Jérusalem et la nouvelle ville. Je vais régulièrement dans la Vieille Ville, en essayant de mieux m’y repérer. J’ai pu visiter Bethléem plusieurs fois ainsi que la campagne autour d’Hébron.
Jean-Malo, mon fiancé, est également venu me rendre visite pour une semaine !! Nous avons pu faire un tour dans le Nord : St Jean d’Acre (Akko), le lac de Tibériade, Tabgha, Capharnaüm, le Mont des Béatitudes et Nazareth. Puis avec Marie et Juliette, un tour jusqu’à la Mer morte et Massada, quelle expérience !! Enfin, retour sur Jérusalem et Bethléem.
L’Œuvre d’Orient se réjouit de la nomination de Mgr Claudio Gugerotti, nouveau préfet du dicastère pour les Églises orientales, à compter d’aujourd’hui. Il succède au Cardinal Léonardo Sandri qui a suivi et accompagné pendant quinze ans les Églises orientales et qui n’a eu de cesse de « trouver les voies de la cohabitation pacifique » dans ces pays si souvent meurtris. L’Œuvre d’Orient exprime au Cardinal Léonardo Sandri sa profonde gratitude pour l’ampleur de la tâche accomplie depuis 2007.
Mgr Gugerotti a étudié les langues et littératures orientales et travaillé comme sous-secrétaire au dicastère pour les Églises orientales à Rome en 1997. Il a acquis une grande expertise des Églises slaves comme Nonce en Azerbaïdjan, Arménie et Géorgie (2001-2011), puis en Biélorussie (2011-2015) et enfin en Ukraine (2015-2020).
Il présidera la Réunion des Œuvres d’aides aux Églises orientales (en italien Riunione delle opere di aiuto alle Chiese orientali, ROACO). Ce comité pontifical créé en 1968 réunit deux fois par an plusieurs dizaines d’œuvres catholiques nationales ou internationales, qui soutiennent financièrement différents secteurs (lieux de culte, santé, éducation…) au Proche-Orient. L’Œuvre d’Orient participe et appartient au comité directeur qui se réunit en janvier.
Sa nomination intervient dix ans après l’exhortation apostolique Ecclesia in Medio Oriente promulguée en septembre 2012 par Benoît XVI. Durant ces dix dernières années, le Moyen-Orient et les pays d’Europe Orientales se sont considérablement transformés, comme l’a souligné le Pape François lors de la précédente ROACO « il faudra vérifier sur le terrain les fruits du Synode pour le Moyen-Orient ; entre-temps, il est nécessaire de trouver des outils actualisés et des moyens appropriés pour exprimer la proximité avec les Églises de la région ».
Pour qu’elles continuent au mieux leur mission, le Pape avait invité les représentants des Églises orientales à garder en ligne de mire l’icône du bon Samaritain : « Vous l’avez fait et je sais que vous continuerez à le faire aussi pour le drame causé par le conflit qui, à partir du Tigré, a de nouveau blessé l’Éthiopie et en partie l’Érythrée voisine, et surtout pour la chère et tourmentée Ukraine. »
L’Œuvre d’Orient est une association catholique et apolitique, reconnue d’intérêt général, qui œuvre depuis plus de 160 ans pour soutenir les communautés chrétiennes au Proche et au Moyen-Orient, qui sont au service de toute la population (éducation, santé, culture).
Elle est membre du Comité de la Charte et bénéficie du label « Don en confiance ». Ce label, garantit la totale transparence sur ses financements et la destination de ses fonds.
Vous trouverez en pièce jointe le témoignage fort de Victor, volontaire pour 6 mois auprès des filles de la charité dans l’école Notre-Dame du Rocher à Ajaltoun.
Je suis arrivé au Liban dimanche 25 septembre, à Beyrouth, mais c’est à 30 kilomètres de là, à Ajaltoun, dans le district du Kesrouan, que je me suis rendu. Je suis envoyé ici pour une
mission de 6 mois au sein de l’école Notre Dame du Rocher dirigée par les Filles de la Charité, congrégation créée par Saint Vincent de Paul. Je suis accompagnée par Laure, une autre volontaire de l’Œuvre d’Orient qui restera 10 mois. J’ai été marqué en arrivant par les fortes inégalités visibles, tant au niveau des constructions et des véhicules. De grandes maisons neuves côtoient des taudis à moitié démolis et des voitures américaines de luxe roulent à côté de vieilles voitures européennes recyclées.
Ici, je ne ressens pas profondément la crise, sans doute parce que je n’ai pas vécu l’avant-après des événements qui ont conduit à cette situation. Malgré tout, lorsque la direction nous explique que l’école n’a plus lieu que 4 jours par semaine parce que cela coûterait trop cher d’ouvrir une journée de plus, je me rends plus compte de la situation catastrophique que traversent les gens ici. Autre difficulté pour l’école, elle ne peut plus accueillir qu’une trentaine d’enfants à l‘internat quand elle en accueillait une centaine auparavant. Quand bien même ! L’école ne fermera pas. Pour le bien du Liban et pour le futur du pays, cela est inconcevable ! Soeur Zahia, qui dirige l’école avec l’appui de Madame Mireille (directrice pédagogique) et de Marie (fonctionnaire dédiée à l’institution), l’a rappelé un matin devant tous les élèves :
“ Vous êtes le futur du Liban et lorsque vous aurez des responsabilités plus tard, il ne faudra pas oublier d’où vous venez et de toujours aider les plus pauvres”
Dans les montagnes, la vie est bien différente de la capitale. De là-haut, je vois chaque matin l’énorme nuage noir de pollution au-dessus de Beyrouth. Le calme règne dans l’école malgré la présence de l’autoroute” qui est à côté. Ce que les libanais appellent “autoroute” est en fait l’équivalent en France d’une route départementale avec le trafic d’une voie nationale. Autre grande différence, la définition de la taille de la commune : pour les libanais, nous sommes dans un village alors qu’il s’agit très clairement pour nous d’une ville : de nombreux commerces, un hôpital, plusieurs écoles, un collège/lycée, des églises… Lorsque nous avons expliqué qu’un village en France était généralement composé d’une dizaine de maisons, sans commerce et, avec un peu de chance, une boîte aux lettres, la surprise était au rendez-vous !
Concernant l’école et l’éducation, le système scolaire présente de nombreuses similitudes avec ce que nous connaissons en France, mais aussi certaines différences ! Les vacances d’été sont plus longues mais il n’y a pas de congés à la Toussaint ou en février. Les classes sont très proches de celles dans lesquelles nous avons étudiés et les professeurs parlent tous un excellent français. Ici, certaines matières sont obligatoirement en français : les mathématiques, les sciences et bien évidemment le français ! Les enfants l’apprennent dès le plus jeune âge et sont parfois trilingues à la fin du collège grâce à l’apprentissage de l‘anglais.
Une journée de cours est rythmée de la manière suivante : les enfants ont cours de 8h à 14h sans vraie pause à midi pour ceux qui ne sont pas internes (les enfants grignotent pendant les récréations). L’après-midi, vers 15 heure, quand les externes sont partis, nous encadrons l’étude et le soutien pour les enfants qui sont à l’internat.
“Votre présence nous dit beaucoup. Vous êtes en train de perpétrer un lien fort entre le Liban et la France, une tradition, une amitié salutaire.”
Les weekends, comme il n’y a pas école, nous en profitons pour visiter le pays et voir d’autres volontaires de l’association. Le premier week-end, nous avons aidé à la confection de confitures de pommes pour une communauté Notre Dame du Mont, à Adma, qui s’occupe d’une maison de repos et d’une maison d’accueil. Nous avons eu la chance d’avoir une messe en français avec un prêtre qui a officié à Paris, Lyon, Saint-Etienne et Ajaccio. Quelques mots de son homélie m’ont beaucoup touchés et j’aimerais vous les partager car ils rappellent bien la raison de notre présence ici et la nécessité pour les Chrétiens d’Orient et les libanais d’être soutenu par la France, fille aînée de l’Eglise :
“Demandez à des jeunes ce qu’est le Liban. Pour beaucoup c’est l’enfer ! Vous êtes une lueur d’espérance pour eux ! Vous allez transformer le monde, changez sa vision sur lui-même, les autres et sur Dieu ! Votre présence nous dit beaucoup. Vous êtes en train de perpétrer un lien fort entre le Liban et la France, une tradition, une amitié salutaire.”
Découvrez le témoignage de notre volontaire Amélie qui est en mission Au Caire au sein de l’école Notre Dame du Carmel St Joseph.
Voilà maintenant plus d’un mois que je suis arrivée au Caire. Quel dépaysement !
Après quelques jours de choc culturel, trois précisément, me voilà sillonnant le Caire à la découverte de ses innombrables musées, églises, synagogues et mosquées. Telle une enfant, je regoûte au plaisir de m’émerveiller de la moindre différence, du moindre exotisme de mon nouvel environnement, de ces odeurs si propres aux pays orientaux… Un doux mélange d’odeur de mangue, de papaye, de pollution, d’ambre, de musc, de benjoin, d’encens, bref, de ces parfums de femmes entêtants que j’aime tant et que notre cher Baudelaire décrivait comme « Ayant l’expansion des choses infinies » et « [Chantant] les transports de l’esprit et des sens ».
À cette odeur si particulière au Caire se mêle le bruit perpétuel de la ville, un bruit de fond, un bruit sourd. D’abord celui de la circulation, une circulation absolument anarchique où l’application du Code de la route est quasi inexistante, où l’usage des coups de klaxon, des signes de la main et des formules de politesse, souvent à coup de « eazizi » (« mon cher », « mon chéri ») remplace celui des clignotants, où la présence de panneaux de signalisation routière laisse à désirer, où l’on double par la droite sans scrupule, et où l’on se frôle à quelques millimètres sans jamais se toucher, et surtout, sans jamais s’engueuler ! En résumé, c’est la loi du plus fort ici qui s’applique mais toujours dans la bonne humeur ! C’est remarquable !
Ensuite vient le bruit de ses habitants, marqué par les cris aigus des marchands ambulants exposant leurs fruits et légumes sur des charrettes tirées par de maigres chevaux, mais aussi par les musiques assourdissantes des tuk-tuks, sensées attirer l’attention des passants, et enfin par les réguliers appels à la prière des muezzins résonnant dans la ville depuis chaque minaret et créant une sorte de douce cacophonie aux accents quelque peu inquiétants… Ici, le silence n’existe pas. On le fuit. En a-t-on seulement peur ? Peur que cela nous fasse découvrir le calme du silence ?…
Enfin, dans cette odeur enveloppante et ce bruit permanent vient s’ajouter un feu d’artifice de couleurs. Au soleil éternel illuminant de ses chaleureux rayons ce pays béni des dieux, répondent la couleur ocre des immeubles cairotes aux persiennes sans cesse fermées afin de conserver la fraîcheur des nuits, le rouge éclatant des grenades, le jaune lumineux des mangues, le vert profond des pastèques et le blanc immaculé des papayes des nombreuses étales de fruits jalonnant les rues.
Ici, les sens sont sans cesse stimulés, d’où mon appréhension des premiers jours à rester huit mois dans cette agitation frénétique ! Mais contrairement à ce que l’on pourrait croire, nos sens se font vite à cette surstimulation, et avec un peu d’audace, l’on parvient finalement à s’imposer au milieu de cette circulation démentielle symptomatique d’une ville totalement dépassée par son nombre d’habitants (10 millions au Caire même et 21 millions dans l’agglomération, ce qui en fait la sixième plus grande agglomération du monde).
Le terme « tentaculaire » est d’ailleurs tout à fait adapté pour parler de cette ville qui empiète toujours plus sur le désert pour construire de nouvelles cités telles que le Nouveau Caire, la Ville du 6 octobre, la Cité du 10 de Ramadan, Sadate-City, Quinze Mai, Al-‘Ubur ou encore Al-Badr afin de désengorger la capitale. Objectif au demeurant non atteint puisque les loyers exorbitants empêchent l’exode des populations du centre-ville vers ces dernières…
Et c’est ainsi que l’on trouve de nombreux cimetières habités par des familles pauvres, notamment la Cité des morts, la plus ancienne nécropole de la ville, où les vivants cohabitent avec les morts. Mais attention, c’est une relation donnant-donnant puisque les mausolées (petits baraquements constitués de quatre murs, d’un toit et d’une grille en guise d’entrée) offrent des moyens de subsistance à ses habitants ! En effet, bon nombre d’entre eux prennent soin des tombes, en creusent de nouvelles ou vendent des fleurs aux rares visiteurs. D’autres, toujours installés au milieu des pierres tombales, travaillent le cuivre ou fabriquent des tapis avant de les vendre au fameux Khan el-Khalili, le souk le plus célèbre du Caire.
Poussés par une (trop) forte curiosité, nous avons, avec d’autres volontaires, traversé celui qui se trouve près de l’enceinte du vieux Caire. Quelle étrange sensation que celle de déambuler au milieu d’une nécropole habitée… Au calme et au statisme environnants répondent des cris d’enfants jouant et s’exaltant de voir des européens « visiter » leur étrange cité. Trois d’entre eux nous ont d’ailleurs suivi à vélo, nous lançant, dans un anglais approximatif, « Hello ! What’s your name ? », tout sourire. Quelle joie de voir dans leur regard briller mille étoiles lorsque l’on prend la peine de leur répondre avec une bienveillance maternelle !
Ici, c’est toi l’étranger. C’est toi qui dois te faire à ton nouvel environnement. Et il n’y a que toi qui puisse t’aider à y parvenir. Il ne s’agit pas de renier ton être, tes racines, ta culture. Non. Être étranger, c’est apprendre à observer, à écouter, à se taire. Être étranger, c’est apprendre à questionner son environnement dans le silence de son esprit et à accepter l’altérité dans le silence de son âme. Être étranger est un apprentissage, une leçon de patience, une leçon d’humilité, une leçon d’abnégation, en somme, une leçon de vie. Et quelle chance de pouvoir vivre cette expérience !
Mais encore faut-il le vouloir car être étranger n’est pas facile tous les jours… D’abord d’un point de vue culturel. Ce qui, il y a un mois, était source d’émerveillement, aujourd’hui peut sembler lourd… À commencer par le rapport homme-femme, un rapport très hiérarchisé et segmenté. En effet, les hommes et les femmes ne se mélangent pas ou alors très rarement et les métros sont divisés en rames hommes et rames femmes. Mais cette organisation n’est finalement pas pour déplaire puisque l’on s’y sent très en sécurité ! D’ailleurs, lorsqu’un homme a le malheur d’entrer dans la rame femmes, celles-ci lui font bien comprendre qu’il n’a rien à faire sur leur territoire ! C’est déjà un bien grand droit qui leur est accordé dans un pays où la position de la femme est moindre… Mais peut-être que ce qui m’attriste le plus, âme romantique que je suis, est le manque de courtoisie des hommes… On peut rêver longtemps que les hommes nous tiennent la porte ou qu’ils nous laissent passer devant eux… !
Mais aussi par le rapport au temps. Un rapport, disons, très flexible ! Ici, on apprend à vivre au jour le jour, ou plutôt à la minute la minute, ce qui force à savourer chaque instant que la vie nous offre. Nulle anticipation et encore moins ponctualité ! Si l’on se donne rendez-vous à 10h, on peut être certain que nos convives arriveront avec tout au moins une heure de retard, si ce n’est plus… Une belle manière d’apprendre à lâcher prise ! Seulement, lorsque l’on se retrouve à devoir donner une vingtaine d’heures de cours de français par semaine, tous niveaux confondus, à des classes d’une quarantaine d’élèves sans programme, et que, à quelques jours de la rentrée l’on demande s’il serait éventuellement possible de parler du programme, des attendus de cette année, et qu’on nous répond « Ne t’inquiète pas, on verra demain ! On a tout notre temps ! », comment ne pas ressentir un certain agacement ?!…
Et enfin, le rapport à l’étranger. Ici, à Shobra, quartier populaire du Caire, je suis la seule blanche. Et, bien que les habitants se font petit à petit à ma présence, leur regard est toujours aussi insistant, surtout celui des hommes. Un regard à la fois curieux et méfiant. Un regard qui questionne. Pourquoi vit-elle ici ? Qu’y fait-elle ? Pourquoi se promène-t-elle seule dans la rue alors que les femmes se promènent généralement en groupe ? Pourquoi nous regarde-t-elle droit dans les yeux alors que les femmes sont censées éviter de croiser le regard des hommes… Quelle étrange sensation que d’avoir l’impression d’être l’une de ces rares femmes affranchies du poids des hommes, alors qu’en Europe, se comporter ainsi est tout à fait normal ! Car, oui, au milieu d’une majorité de femmes voilées (rappelons que 90% des égyptiens sont musulmans et seulement 10% sont coptes), certaines femmes, habillées à l’occidental et arborant fièrement leur chevelure d’ébène, font figure de résistantes.
Mais être étranger n’est pas facile tous les jours aussi d’un point de vue environnemental. En effet, il est quasiment impossible de se ressourcer dans un environnement en perpétuel mouvement, où le bruit est incessant, l’air des plus pollués (l’on se promène tous les jours dans un brouillard de pollution), et les arbres et la sensation d’infini inexistants… Alors on creuse dans ses souvenirs pour sa rappeler du sentiment de liberté que l’on éprouvait après une bonne journée d’ascension en montagne, de la sensation de fraîcheur d’une promenade dans les sous-bois par jour de pluie, de l’euphorie que procure l’apparition des premiers flocons de neige, saupoudrant comme dans un conte les paysages endormis d’hiver, et enfin de l’impatience et de la joie immense ressenties à l’approche de Noël, avec son lot de préparatifs et de mondanités, avec son odeur de feu de cheminée, ses retrouvailles familiales, ses éternels repas où les mets les plus délicieux rivalisent sur la table, et où l’on peut ressortir ses plus belles robes de velours, ses plus beaux manteaux, ses plus beaux collants et ses plus belles fourrures pour honorer la messe de minuit !
Et oui, tout cela me manque énormément… Ma famille, mes amis, les personnes qui me sont chères, ma France, ses traditions, ses us et coutumes, ses paysages si variés, ses saisons… Je mesure ma chance d’y être née, d’avoir grandi dans un pays libre et démocratique, et surtout dans une famille si aimante qui me laisse croire en mes rêves ! Mais j’ai choisi pour le moment d’être ici. Et, bien que ce ne soit pas facile tous les jours, je sens que ma place est ici et nulle part ailleurs, que je ne changerai ma place pour rien au monde, et que j’ai quelque chose à apporter à mes petites élèves qui sortent de cours avec des étoiles dans les yeux, me disent « Madame Amélie, on vous aime beaucoup ! » ou encore « Vous êtes douce comme le miel » (ce qui est un très beau compliment ici), et viennent me faire des câlins à la fin du cours, comme pour me remercier de la douceur et de la bienveillance que je daigne leur offrir le temps de quelques heures par semaine. Et ça, ça vaut tout l’or du monde !
Les mots me manquent parfois pour exprimer ce que je ressens. Mais, bien que ce ne soit pas facile tous les jours, j’éprouve un sentiment de profonde gratitude d’être ici ; de profonde gratitude envers mes proches qui m’ont soutenue dans ce projet mais aussi envers le Seigneur qui m’a donné la chance de partir me donner et vivre la gratuité du don de soi.
Ici, on donne beaucoup, mais on reçoit tellement ! Et c’est si naturel… ! Je peux passer en effet des nuits blanches à corriger une quarantaine de copies ou à préparer les cours du lendemain, je peux passer les trois quarts du cours à faire la police plutôt qu’à faire mon cours… Mais cette fatigue est largement compensée par le fait que je, jour après jour, je vois mes petites élèves progresser en français et gagner en confiance en elles. Et peut-être que ce qui me remplit encore plus de joie, c’est de voir les plus rebelles de la classe, chacune à leur manière, pour des raisons bien pardonnables, sortir de leur carapace et s’intéresser chaque jour un peu plus à notre belle langue ; c’est de voir que la bienveillance, la confiance, l’attention et l’amour dont elles manquent tant, que je peux leur apporter pendant mes cours, les fait s’ouvrir à la douceur et à la beauté. Là, je peux dire que ma mission est pleinement remplie !
Cela me fait penser à un livre que je lis en ce moment, de l’Abbé Grosjean : Donner sa vie, et à une page précisément. Celle dans laquelle il écrit : « On peut choisir de garder sa vie pour soi, mais en fait on la perdra. La réussite humaine qu’on pourra connaître un temps ne sera qu’enfumage, façade ou paravent d’un échec plus profond et sans doute d’une tristesse immense. Il ne restera pas grand-chose d’une vie vécue pour nous-mêmes, dont nous nous serions fait l’unique centre. Et si on peut s’aveugler quelques années, on risque une fin de vie bien douloureuse en découvrant son peu de fécondité réelle : « Tout ce qui n’est pas donné est perdu. » Il y a des vies qui durent longtemps mais qui sont creuses, vides d’un amour qui n’a pas été donné.
On peut faire un autre choix. On peut choisir de reconnaître que la vie est un don, et si on est croyant, un don de Dieu et en même temps une marque de confiance qui appelle une réponse de notre part. En reconnaissant notre vie comme un don de Dieu, nous nous découvrons intendants et non propriétaires. Dans l’Evangile, Jésus évoque plusieurs fois cette figure de l’intendant à qui le Maître confie une part de ses biens ou de sa vigne. L’intendant sait qu’il prend soin de quelque chose qui ne lui appartient pas mais qui lui a été confiée. La Maître compte sur lui et lui fait confiance pour que cette parcelle de vigne porte du fruit.
Nous avons reçu notre vie de Dieu. Toute vie est un don de Dieu. Même la plus fragile, même la plus blessée ! Nous avons été appelés à la vie ! Quelles que soient les circonstances de notre conception, nous sommes au moins immensément aimés par Dieu, auteur de toute vie. Dieu nous aime en nous donnant la vie, en nous appelant à la vie.
Une vie éternelle, dont la vie sur terre n’est qu’une première étape. C’est ainsi qu’il faut regarder sa vie. Notre existence elle-même est donc une preuve de l’amour de Dieu pour nous.
Ce que nous avons reçu est fait pour être donné. L’amour appelle l’amour. Nous sommes ainsi appelés à donner par amour cette vie que nous avons reçue par amour. Nous sommes appelés à mettre « au service » notre vie pour aimer à notre tour. »
Je peux dire qu’aujourd’hui je me sens heureuse, heureuse de me donner ainsi, heureuse d’être ici. Et d’autant plus heureuse que ce temps, fait de partage et de solitude permet de se retrouver, et même je dirais de se rencontrer ; de comprendre que, finalement, nous n’avons de limites que celles que nous pensons avoir.
J’aurais encore tellement de choses à vous raconter mais il faut bien que les bonnes choses aient elles aussi une fin. Ma première lettre se termine donc ici. J’espère qu’elle aura su faire voyager votre esprit !
La prochaine arrivera le 20 novembre (et oui, il faut que je rattrape mon retard… !) et j’ai une belle nouvelle à vous annoncer !
En attendant, je vous embrasse tous bien affectueusement, Amélie