[LIBAN] « Nous avons vu défiler de nombreuses personnes, pour une consultation médicale, des médicaments, une oreille attentive. »

Gabrielle, Juliette et Marguerite, volontaires au Liban, sont allées sur le temps libre visiter les Sœurs de Nazareth au camp palestiniens de Dbayeh. Elles nous racontent leur entretien.


La détermination à toute épreuve des Sœurs de Nazareth

Nous avons longuement discuté avec Sœur Magda mais nous n’avons pas eu l’occasion de visiter le camp. Nous devrions y retourner cette semaine pour le faire. C’était déjà une super expérience, Sœur Magda est une petite sœur, c’était un honneur de la rencontrer. La situation est effectivement de plus en plus critique dans le camp à cause de la crise, les pères de famille n’ont plus de travail, ils ne peuvent plus payer les bus scolaires pour que leurs enfants aillent jusqu’aux écoles publiques et certains enfants sont obligés de travailler eux-mêmes… Pendant que nous discutions avec Sœur Magda, nous avons vu défiler de nombreuses personnes, pour une consultation médicale, des médicaments, une oreille attentive… C’est fort de voir comment les sœur se sont implantées depuis 30 ans auprès de ces familles. Sœur Magda nous racontait qu’au fur et à mesure, les gens se confiaient plus facilement à elles, après avoir passé de longues années à maintenir les apparences malgré les difficultés. Aujourd’hui, les sœurs utilisent l’argent des donateurs (notamment de L’Œuvre d’Orient) pour acheter une partie des médicaments dont les familles ont besoin.

Au-delà de la misère, développer les talents des réfugiés

Ayant un statut de réfugiés, ils n’ont accès qu’à un nombre de métiers limités, et avec la crise actuelle, il est très difficile de trouver un travail, même le plus modeste. Sœur Magda nous confie qu’un de ses désirs est de pouvoir développer les talents des habitants de ce camp. Elle nous donne l’exemple de cette jeune fille avec une maladie de peau chronique qui aura donc très peu de chance de recouvrer une vie sociale et professionnelle épanouie. Lors d’une visite, elle se rend compte que cette jeune fille possède un talent certain pour le dessin, elle arrive alors à rassembler un peu d’argent pour lui payer des cours de dessin. Dans l’espoir qu’un jour, ce talent lui permette d’en vivre.

À la fin de notre entretien, Sœur Magda nous redis combien l’aide de L’Œuvre d’Orient est précieuse et combien elle lui est reconnaissante.

 

Pour soutenir notre action au Liban : https://secure.oeuvre-orient.fr/soutenir

Un mission de volontariat international vous intéresse ? Cliquez ici.

 

« Ma sœur, on te met dans un taxi »

Eglantine Gabaix-Hialé, chargée de mission à l’Œuvre d’Orient, a vécu et travaillé 6 ans en Egypte, Syrie et Irak. Dans un article pour Ouest France, elle témoigne de l’importance des religieuses en Orient. Des femmes extraordinaires qui n’ont de cesse de porter le monde dans leurs prières. 


« En Irak, en Syrie, en Égypte, en Palestine, en Arménie, en Iran, leur présence semble immémoriale.  Elles ont toujours été là. Discrètes, exubérantes, profondes, futiles parfois, souriantes toujours, ou presque. Dans une léproserie près de Tabriz en Iran, aujourd’hui fermée, Henriette, libanaise, sort un scrabble et vous met au défi, cela fait si longtemps qu’elle n’a pas joué en français. Elle triche avec une bonne foi déconcertante, expliquant que ces mots existaient de son temps, d’un temps qui n’a sans doute jamais existé. Mais leurs mots sont rarement de trop.

« Où vont nos prières ? » me demandait Bouchira, au bord des larmes, à Nazareth en 2012 au tout début de la guerre en Syrie. Elles sont simplement là, à rattraper le monde, à éduquer, enseigner, soigner, à récupérer tous ceux dont personne ne veut, à écoper la misère avec une petite cuillère et une tendresse à ressusciter un pendu.

« Des gamins !  Je les avais connus tout petits. Ils nous chassaient de Mossoul, parce qu’ils étaient devenus des hommes de Daesh. Ils m’ont dit :  ma sœur, on te met dans un taxi. Et ils nous ont toutes mises dans un taxi. Je lui ai dit merci Oussam. Il a rougi, je l’avais reconnu malgré son foulard qui barrait son visage. Des gamins ! » se souvient, émue, Elishoua.

Elles racontent avec des mots crus ou étouffés, elles disent toute la beauté et la cruauté du monde, elles se livrent peu. D’elles on ne saura jamais grand-chose. De ce qui les a poussées à prendre le voile. A renoncer. Pour mieux accompagner les plus faibles, dans une abnégation incompréhensible au commun des mortels. Ou pour d’autres raisons dont on leur laissera le secret.

Des histoires d’enfants échoués dans leurs orphelinats, elles en ont autant que d’années de sacerdoces. Devenus adultes ils leur seront reconnaissants du soin qu’elles leur ont porté, aussi. « Son beau-père l’a violée, elle avait 4 ans. Pendant 3 ans, elle n’a pas dit un mot, rien, elle était mutique. Elle vient juste de raconter ce qui c’était passé, ça dépasse votre imagination ». Si vous les écoutez, elles vous feront entendre le cri des enfants muets de douleurs. « Mais parfois, confie Arousiag, quand je vois que rien ne change, que rien n’avance, alors je vais à la chapelle, et je dis à Dieu : après tout ce sont vos enfants, pas les miens, si vous ne voulez pas prendre soin d’eux, c’est votre problème ! »

Enracinées depuis des années dans leur pays d’adoption, elles ont souvent l’analyse la plus pertinente de la société dans laquelle elles vivent. Elles vous diront l’oppression, la corruption, la manipulation, le patriarcat. A Jérusalem, Rose, 90 ans, d’origine allemande, en Israël depuis 50 ans, raconte le désespoir des Palestiniens, leur lassitude, leur envie d’exil, l’absurdité de ce mur érigé en frontière. Mais conclue : « Vous savez avant le 9 novembre 1989, je n’aurais jamais imaginé une seule seconde que le mur de Berlin puisse tomber… Alors, c’est bien que les miracles existent, non ? »

Elles vous feront entendre les mots des femmes, des hommes écorchés par la guerre, leur détresse, leur peur, leur terreur. Elles vous feront entendre la supplique de ceux qui fuient. Leur désir fou de sauver leur peau et surtout d’espérer un avenir meilleur pour leurs enfants. Si vous prenez le temps de les écouter, ces femmes voilées, qui se cachent, se dérobent, sont invisibles, elles vous diront le monde dans un éclat de rire, transpercé. Avec une infinie tendresse. Les religieuses, nos sœurs. »

 

Photo : © Jean-Matthieu Gautier

[SYRIE] La situation humanitaire – Témoignage de Vincent Gelot

Vincent Gelot, responsable projets Liban/Syrie, s’est exprimé au sujet de la crise qui s’intensifie actuellement en Syrie, d’où il revient. 


L’urgence humanitaire concerne l’ensemble de la Syrie

Neuf ans après le début de la guerre en Syrie la situation économique et sociale des Syriens s’est profondément détériorée. Alors que les combats autour d’Idlib focalisent l’attention médiatique, Vincent Gelot, responsable projets en Syrie et au Liban pour L’Œuvre d’Orient, rappelle que c’est l’ensemble du pays qui pâtit des sanctions comme des séquelles de la guerre. Dans le Golan, la vallée des Chrétiens, le Nord-Est syrien, à Homs, à Alep et même à Damas, les populations font face à un besoin croissant de biens de première nécessité. « La crise économique est inédite et pire que lorsque les zones en question étaient au centre des combats », précise Vincent Gelot. Le salaire moyen en Syrie actuellement se situe autour des 40$ par mois, ce qui rend compliqué l’achat de produits alimentaires dont le prix est passé du simple au double en deux mois.

L’impact de la crise libanaise sur la situation en Syrie

Cela est d’autant plus difficile que le Liban traverse une crise économique sévère et que la relative bonne santé du système bancaire libanais constituait pour les Syriens un poumon financier, une partie des aides transitant par leur voisin. « Bien souvent les comptes bancaires des Eglises, des patriarcats, des évêchés sont au Liban », souligne Vincent Gelot. Or, comme l’ensemble de la population libanaise, les instances religieuses ne peuvent retirer que 300$ par semaine, en dépit de la forte inflation et des besoins toujours croissants des communautés qui dépendent d’elles.

Des besoins qui vont au-delà de la sécurité et de la subsistance alimentaire

L’état de détresse se voit aggravé par des conditions climatiques très rudes, avec des températures hivernales particulièrement basses. En de nombreux endroits, les familles n’ont pas de quoi se chauffer, par contrainte financière ou plus simplement car les systèmes de distribution en eau et en électricité sont défaillants. Un autre point de vigilance réside dans l’importance des chocs post-traumatiques dus à la guerre et aux bombardements. Vincent Gelot explique : « Les éducateurs nous disent qu’ils se trouvent en difficulté parce qu’il y a toute une part de traumatismes qu’ils ne savent et ne peuvent pas gérer » chez les jeunes. On observe également une augmentation du nombre de cancers parmi les foyers syriens.

Face à la misère, la persévérance des ONG

Si les conditions de travail des ONG sont défavorables, de nombreuses initiatives ont vu le jour et continuent de porter secours aux populations syriennes. C’est le cas de l’école chrétienne de Hassaké, qui accueille sans distinction chrétiens comme musulmans. Il en est de même pour le JRS et leur activité dans les camps de réfugiés, ou bien pour les religieuses des Saints Cœurs, qui animent des centres de suivi psycho-social. La Syrie est l’un des pays destinataires prioritaires des aides de L’Œuvre d’Orient, avec une cinquantaine de communautés aidées, pour un montant d’environ 3,5 millions d’euros. Pour autant, et en raison des nombreuses difficultés mentionnées ci-dessus, les besoins des chrétiens de Syrie ne cessent de croître depuis 2011.

Pierre BLANC

[HAUTE-EGYPTE] Le témoignage d’Henri : « je me sentais très attaché à cette part de l’Egypte que je venais de découvrir »

 « Henri, 23 ans, séminariste, fait une pause entre les années de philosophie et de théologie pour enseigner le français au Caire. Il nous raconte son expérience en Haute-Égypte. »


Au cours du mois de janvier j’ai fait deux séjours en Haute-Egypte. Le premier a été assez bref. Comme il le fait tous les ans avec les volontaires, le frère Sameh nous a invités, Baptiste, Thibault et moi, à célébrer Noël copte dans son village d’origine, à Bayadeya, dans le district de Minya. Comme j’avais à faire au Caire, je suis reparti le lendemain de Noël avec le frère, à grand regret, car je me sentais très attaché à cette part de l’Egypte que je venais de découvrir. J’y suis retourné fin janvier avec un camp de professeurs lasalliens qui donnent une semaine des vacances scolaires pour s’occuper des jeunes des villages. Nous étions à Kom Boha, village entièrement chrétien entre Minya et Assiout. J’ai alors passé un certain temps en contact avec ces jeunes, à participer aux activités qu’on leur faisait faire, malgré la barrière de la langue! Le curé catholique nous donnait accès à la paroisse et à ses locaux pour accueillir les enfants du village à la journée et organiser les jeux, les sketchs et les ateliers.

En Haute-Egypte, on a l’impression de découvrir la véritable identité de ce pays et de ses habitants. Les gens vivent de peu. Les maisons sont des lieux souvent très modestes où, à part le sommeil et les repas, il n’y a pas beaucoup de place pour y vivre, et certainement pas pour le loisir. Le reste de la vie se fait donc dans la rue, et pour les hommes, dans les cafés où ils se retrouvent pour fumer une shisha au miel noir et jouer sans fin au backgammon ou aux dominos. Les champs qui s’étendent autour du Nil et de ses canaux fournissent du blé et et des plantes pour les bêtes. Pas de machine agricole: on transporte les récoltes à dos d’âne et on se déplace en mobylette ou en vieille Vespa retapée. Autour des champs: les habitations, puis le désert qui s’étend sans fin.

La culture et le mode de vie sont nés ici. Et pourtant, même pour les professeurs avec qui nous étions, des Egyptiens cultivés du Caire et d’Alexandrie, le dépaysement était déjà grand. Ce pays vit à un autre rythme, et cela se ressent dans l’éducation de la jeunesse.

On est d’abord frappés par le nombre de jeunes et d’enfants qui, assez inoccupés quand ils n’ont pas école, passent du temps dans les rues alors qu’elles sont étroites et insalubres. Les garçons y sont les rois. On y croise moins de filles, qui peuvent encore jouer avec les garçons à un âge très tendre, mais rentrent vite à la maison dès l’adolescence et y restent entre elles. C’est pour cela qu’elles étaient plus nombreuses aux activités proposées par le camp des professeurs, car cela changeait leur quotidien. Les garçons, en revanche, étaient plus rare, car moins enclins à renoncer à leur totale liberté de mouvement dans les rues pour suivre des activités imposées.

Quand je reviens de là-bas au Caire, je trouve que je le comprends mieux, que je le connais mieux. Tous ses habitants viennent de Haute-Egypte et sont arrivés il y a une ou deux générations, et la vie dans cette métropole surpeuplée se déroule encore un peu comme sur les rives du Nil là-bas. Les rues sont tout aussi mal entretenues, et le bourdonnement semi-agité, semi-oisif des commerçants, des travailleurs, des automobilistes s’étend jusque tard dans la nuit. L’activité ne s’arrête jamais vraiment puisqu’elle n’a jamais vraiment commencé… Le Caire est bien la capitale de ce pays-là, et non pas une « ville occidentale qui marche moins bien » comme on en a d’abord l’impression quand on vient de Paris ou de Lyon. Et c’est sans doute c’est sans doute ce genre d’expérience, moins touristique, qui nous attache vraiment à cette culture et à ce pays.

L’icône de la Dormition du patriarcat maronite

Après un travail minutieux de restauration de deux ans, l’icône de la Dormition redécouverte dans la salle des archives du patriarcat maronite à Bkerké (Liban) va être exposée à la salle des icônes du Petit Palais du 3 au 29 mars 2020. L’inauguration a lieu le mardi 4 mars en présence de l’ambassadeur du Liban, Mgr Pascal Gollnisch, Delphine Lévy, Directrice générale de Paris Musées Christophe Leribault, Directeur du Petit Palais. Retour sur l’histoire de cette icône et sa restauration.

 

Les icônes dans la tradition orientale chrétienne

D’après l’historiographie traditionnelle, deux périodes culturellement prospères ont marqué l’histoire de l’art des chrétiens d’Orient. La première coïncide avec l’instauration du califat abbasside, avec pour centre culturel et politique la ville de Bagdad, de la moitié du VIIIème siècle au Xème siècle. Durant cette période, les Eglises schismatiques, se libérant de la tutelle de Constantinople, s’épanouissent et développent une création artistique singulière.

La seconde période débute au XVIème siècle avec l’essor de l’Empire ottoman, qui va créer un climat stable propice au renouveau culturel au sein de l’empire, y compris pour les communautés chrétiennes d’Orient. Lors de cette période de prospérité, les chrétiens d’Orient vont marquer leur singularité, notamment par leur production artistique. Celle-ci va s’inspirer des nombreuses influences entre l’Empire ottoman et l’Europe, qui vont d’ailleurs être à l’origine d’une mixité inédite des différentes communautés chrétiennes les unes avec les autres.

Les icônes sont des objets d’art, mais elles participent également au divin. Ainsi, elles sont marquées par leur dimension à la fois historique mais aussi religieuse. L’icône permet de représenter les personnes auxquelles s’adressent les fidèles et établissent un lien entre le réel et le divin. La fin du XVIème siècle est synonyme de renouveau pour l’art des icônes. La ville d’Alep va s’imposer comme centre culturel et artistique de la production d’icônes. Cependant, des œuvres vont être produites aux quatre coins de l’empire. Situé au carrefour des traditions occidentales, grecques, byzantines ou encore ottomanes, l’art chrétien ne va pas échapper à ces inspirations multiples, lui conférant une certaine originalité. Cette période de prolifération artistique et d’âge d’or des icônes va perdurer jusqu’au XVIIème siècle, avant de connaître un certain déclin au XVIIIème siècle. C’est durant cette période de renouveau artistique qu’a été peinte l’icône de la Dormition de Marie présentée ici.

La Dormition de Marie

Cette icône représente la Dormition de Marie, dont les récits font partie de la littérature florissante des premiers siècles de l’Église. Pour les chrétiens, le mot « dormition » désigne la mort non-violente et apaisée d’un saint. Pour les chrétiens d’Orient, la Dormition désigne la mort terrestre de la Vierge Marie ainsi que son élévation au ciel. Ce culte a été instauré par l’Empereur byzantin Maurice (539-632). Aujourd’hui, la Dormition de la Vierge est célébrée par les Églises d’Orient le 15 août, le même jour où l’Église catholique romaine célèbre l’Assomption.

D’après le récit traditionnel de la Dormition, c’est l’archange Gabriel qui annonça à Marie sa mort en lui remettant une palme. Elle prépara alors sa dernière prière avec les apôtres, transportés miraculeusement par des nuées autour d’elle. Jésus apparût alors pour accueillir l’âme de sa mère, accompagné d’anges. Les apôtres portèrent le corps de la Vierge jusqu’à son tombeau, mais sur le chemin, un juif dénommé Jephonias tenta en vain de profaner le corps de Marie. C’est alors qu’un ange muni d’une épée de feu apparut et trancha les mains de Jephonias, qui restèrent suspendues dans les airs. Après que Jephonias eut finalement proclamé la sainteté de la Vierge, saint Pierre rattacha ses mains à ses bras. Selon une seconde version, les mains de Jephonias furent rattachées à ses bras après une invocation à la sainte Vierge. Le corps de la Vierge fut ensuite déposé dans son tombeau.

D’après certains écrits, Thomas, retardé en Inde, fut emporté sur un nuage vers Jérusalem et rencontra la Vierge dans les airs. Il lui demanda de le bénir, ce qu’elle fit en lui offrant sa ceinture. En arrivant à Jérusalem, Thomas demanda à voir le tombeau de Marie. En l’ouvrant, les apôtres constatèrent qu’il était vide. C’est alors que Thomas, montrant la ceinture de la Vierge, raconta comment il avait vu le corps de Marie monter au ciel.

On retrouve au centre de cette œuvre le Christ entouré d’anges, au sein d’une mandorle, recevant l’âme de sa mère. L’âme de la Vierge est représentée sous la forme d’un nouveau-né emmailloté, tandis que son corps repose sur le lit mortuaire, encensé par saint Pierre à gauche. A droite du corps, on distingue saint Paul se prosternant aux pieds du corps de Marie. Les deux saints sont entourés d’apôtres et d’évêques déplorant la mort de la Vierge. En bas de l’icône, sur la gauche, on distingue l’ange Gabriel tranchant les mains de Jéphonias, conformément au récit traditionnel de la Dormition.

La restauration de l’œuvre

Longtemps conservée dans la salle des archives du patriarcat maronite à Bkerké (Liban), l’icône de la Dormition de Marie a souffert des conditions de conservation, notamment de l’humidité et de dégâts des eaux, qui ont endommagé l’œuvre. Présentée au grand public lors de l’exposition « Chrétiens d’Orient, 2000 ans d’histoire » à l’Institut du Monde arabe en 2017-2018, une étude approfondie de cette œuvre a mis en évidence la nécessité d’une restauration de l’icône, proposée par le Petit Palais sous la direction de Raphaëlle Ziadé, conservatrice responsable de la direction scientifique et du pilotage du projet. Après autorisation du Patriarcat maronite, la restauration de l’icône a été prise en charge par le Petit Palais en septembre 2018, avec la participation financière de l’Ambassade du Liban, de l’Œuvre d’Orient et de mécènes privés.

Cette icône est une peinture sur bois mesurant 1,80 mètre de haut, s’inscrivant dans la continuité du style byzantin. Elle se compose de quatre planches en bois maintenues par trois traverses, dont deux étaient bloquées. L’expertise de l’état de l’œuvre a également établi que plusieurs parties de la couche picturale ont été repeintes à maintes reprises. La première partie de la restauration a consisté à débloquer les deux traverses du revers, qui endommageaient la peinture. Ensuite, une restauration de la couche picturale a été entreprise en différentes étapes. L’essence du bois a également été analysée, permettant d’affirmer qu’il s’agit de bois de cèdre, arbre emblématique du Liban.

Un élément essentiel a été révélé par cette restauration : la datation de l’icône. L’utilisation de rayons ultraviolets a permis d’établir la date de réalisation à 1523, ce qui constitue une nouvelle source de connaissance du patrimoine des chrétiens d’Orient. En effet, aucune icône libanaise de cette période n’était connue jusqu’alors. Cette datation permet d’affirmer que cette icône appartient au courant de renouveau artistique qu’ont connu les chrétiens d’Orient du XVIème au XVIIème siècle sous l’Empire ottoman.

Cette restauration a également bénéficié de partenariats scientifiques avec l’INP (Institut National du Patrimoine), l’INHA (Institut national de l’Histoire de l’Art) et le C2RMF (Centre de recherche et de restauration des Musées de France). Vous pouvez découvrir cette icône lors de d’une exposition du 3 au 29 mars 2020 dans la salle des icônes de la Fondation Sisley d’Ornano, au Petit Palais, Avenue Winston-Churchill, fravant son retour au Liban.

Sources :

https://www.lesclesdumoyenorient.com/Icones-arabes-art-chretien-du-Levant

http://www.petitpalais.paris.fr/collections/actualites/une-exceptionnelle-icone-du-patriarcat-maronite-restauree-au-petit-palais

https://oeuvre-orient.fr/actualites/la-vierge-marie-en-orient-et-en-occident-dormition-ou-assomption/

http://www.1oeuvre-1histoire.com/dormition-vierge.html

https://www.narthex.fr/blogs/le-patrimoine-des-chretiens-dorient/l2019icone-de-la-dormition-de-notre-tres-sainte-dame-la-mere-de-dieu

 

Infos : 

au Petit Palais

Avenue Winston-Churchill, 75008 Paris

petitpalais.paris.fr

[TERRE SAINTE] Louis et Bertile : « Ainsi notre longue et belle chaîne de rencontres marquantes continue de se créer »

Louis, journaliste de 29 ans et Bertile, éducatrice de 26 ans, ont décidé peu après leur mariage de faire une mission avec l’Œuvre d’Orient en Terre Sainte. Mais pour rallier leur mission à l’Abbaye d’Abu Ghosh en Israël, ils y sont allés à pied, découvrant une vie des paysages et des gens extraordinaires en itinérants mendiants pendant 4 mois. Leur témoignage, comme celui de leur périple est passionnant.


Étonnant, presque anesthésiant d’entrer dans la Ville Sainte, de poser les bâtons, de se poser tout court, sans réaliser que cette fois, c’est fini pour de bon. C’est comme si tout à coup, sans prévenir car on a beau s’y préparer on n’est jamais trop prêt : une grande pendule avait suspendu son cours au-dessus de nos têtes, et du jour au lendemain, on a tout le temps du monde : temps de flâner, de dormir, de se remettre à lire, de commencer doucement à apprivoiser cette Terre entrevue en rêve pendant 140 jours et qui ne se laisse pas appréhender en une fois, ni même en dix. Ni même en quarante-cinq ans, si l’on en croit les Frères et Sœurs.

Étonnement béat de se glisser, après ces mois de nomadisme, dans un lit propre et de se dire qu’il sera le nôtre pour les cent prochaines nuits. On aimait le suspens teinté d’appréhension qui nous faisait nous demander chaque matin : et ce soir ?

On aime tout autant la joie tranquille que l’on trouve à s’installer, dans un petit « chez-nous ».

Étonnement de constater que nos corps se déshabituent à la marche bien plus vite qu’ils ne s’y sont pliés ! Et que les rituels « d’avant » qui nous semblaient si loin, semés quelque-part dans les Alpes, reviennent au grand galop ! De notre pèlerinage, il nous reste quelques petits rayons intérieurs dont nous devrons prendre grand soin, pour que le quotidien et son lot de routine restent…un lieu d’étonnement !

Heureusement, l’Abbaye Sainte Marie de la Résurrection nous y aide. Déjà, parce qu’elle est le lieu de l’étonnement par excellence, celui des disciples d’Emmaüs qui retrouvent, ébahis, leur Christ bien vivant. De cette histoire, on ne peut se lasser, et elle se cache partout pour qui veut bien la voir.

Ensuite, parce qu’elle jaillit comme une improbable surprise au milieu d’un village arabe tout construit, et qu’on se demande comment ses palmiers de vingt mètres peuvent passer inaperçus depuis la rue. C’est sûrement qu’ils se plaisent à garder le secret jusqu’à ce qu’on pousse le portail pour nous happer, en même temps que les fresques, la végétation, les chants et le sourire des bénédictin(e)s qui y vivent. Et nous avec eux à présent ! Ils nous ont accueillis comme une famille, et nous laisserons à coup sûr une partie de notre cœur ici à l’abbaye.

De cette vie consacrée, on n’a sûrement pas saisi le tiers de la beauté, le grégorien nous fait encore bâiller, notre banc reste vide aux Matines et aux Laudes… mais on pressent partout combien leur Règle n’est que la mise en œuvre de l’amour de Jésus, et l’apprentissage de la Liberté avec Lui.

Il n’y a ici ni mines lugubres, ni interminables chapelets, ni pain rassis, ni règles contraignantes. La vie bénédictine est pleine de couleurs : en témoignent les habits bigarrés de nos Sœurs congolaises, de galettes ou de tartes aux fraises, de verres de vin plus souvent pleins que vides, de flûtes traversières et de harpe africaine… Elle sent bon l’encens et le limoncello, les huiles essentielles et l’herbe coupée, elle crépite en un bon feu de bois et nous donnerait presque envie d’y faire notre nid !

Quant à notre mission, elle n’a rien de moins étonnant ! Elle détonne même franchement puisqu’elle nous fait passer quotidiennement d’un univers à l’autre, sans jamais laisser d’empreinte de « déjà vu ».

Il faut dire que passer du rayon théologie  où chaque livre feuilleté est une découverte à la délicieuse odeur de cire fondue où l’on manie des fleurs séchées, tandis que l’amoureux de la terre taille, nettoie, débroussaille et plante, avant d’émailler coupelles et autres biscuits prêts à être enfournés…cela n’a rien de banal. Le jardin qui fait la fierté de la communauté, et on les comprend, se transforme chaque jour sous l’action du soleil, de la pluie et des doigts magiques de ces bénédictins dont les mille talents font vivre et les lieux et les âmes. C’est un honneur et un bonheur pour nous de participer bien petitement à conserver la beauté de ces lieux et de travailler dans divers lieux tous passionnants. Chacun a des missions bien définies : beaucoup de jardinage et de bricolage pour Monsieur, mais aussi du ménage, de la céramique, de la cueillette et de l’épluchage de citrons… Quant à sa femme petit rat de bibliothèque, elle côte des livres tous plus intéressants les uns que les autres, se réjouit de décorer les bougies coulées par Soeur Marie-Judith…

Rien d’étonnant dans le fait que Louis manie l’art de la vente aussi bien que le sécateur : son passé de serveur/vendeur l’y aide bien. En revanche, grande surprise de constater qu’après 27 années de lourd handicap mathématique, Bertille est finalement capable de rendre correctement la monnaie, et dans plusieurs devises s’il vous plaît ! Oui, car le magasin artisanal rempli de mille trésors nous occupe bien, surtout depuis que les vacances scolaires nous envoient des cars entiers de pèlerins soucieux de faire vivre ces belles communautés…parfois tous en même temps !

Pour terminer, nous nous émerveillons quotidiennement des arrivées rythmant la vie de l’hôtellerie. Ici à Emmaüs, lieu de Rencontre par excellence, les chambres se remplissent et se vident, mais leurs occupants laissent toujours quelque-chose dans nos mémoires ; quelle chance de partager les lieux et nos repas avec chaque fois de nouveaux visages ! Jeunes ou plus âgés, couples, célibataires, consacrés, croyants, fraîchement convertis, en chemin…tous ont des histoires passionnantes, des expériences à partager, des témoignages à donner et nous comprenons de plus en plus que chaque personne mérite d’être connue pour ce qu’elle est.

Ainsi notre longue et belle chaîne de rencontres marquantes continue de se créer, maillon après maillon, alors même que notre marche a pris fin. Mais comme on se répète souvent, notre pèlerinage ne fait que commencer !

Merci encore de nous avoir envoyés ici, où nous sentons jour après jour combien la grâce du Christ est vivante et travaillante !

[SYRIE] Cathédrale d’Alep-Vos dons en action !


 

 

 

 

 

 

 

 

Après la pose du toit en décembre dernier, la réfection de la cathédrale maronite d’Alep se poursuit. C’est au tour de la nef et du chœur d’être rénovés, toujours avec le soutien de L’Œuvre d’Orient.
L’édifice avait été sévèrement endommagé par une pluie d’obus en avril 2015. Les travaux de restauration de la cathédrale Saint-Elie ont pu voir le jour grâce à vos dons ! Encore merci pour votre générosité 🙏

 


Découvrez les photos du chantier ⇓ 

Avant, l’intérieur de la Cathédrale dévastée

 

Pendant le chantier

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Après la pose de la charpente

 

 

 


 

Tout cela est possible grâce à vous ! Merci ! 

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[TERRE SAINTE] Le témoignage d’Astrid : « Ici, tout se vit avec une intensité impressionnante »

Astrid, 22 ans, étudiante à l’école des Mines, est partie en mission deux mois entre deux stages de césure, pour donner le meilleur d’elle-même en mission auprès d’une communauté. Avec Jeanne elle est chargée des visites du Tombeau du Juste et travaille dans l’hôtellerie des Sœurs de Nazareth.


J’avais signé pour aider les sœurs de Nazareth « à s’occuper de leur trésor », mais j’étais loin de m’imaginer que ce trésor serait aussi riche à mes yeux ! En guidant les pèlerins découvrir le Tombeau du Juste, j’ai eu la chance de vivre pendant 50 jours sur un lieu archéologique chargé d’histoire, au rythme des sœurs dans leur couvent magnifique et au rythme de leur hôtellerie qui accueille des pèlerins du monde entier… Tout cela dans ce village de Nazareth où Jésus a vécu 30 ans, dans ce pays Israël marqué par son histoire difficile et pourtant si belle, dans cette Terre Sainte qui n’a pas fini de dévoiler ses trésors. Ici tout se vit avec une intensité impressionnante, à laquelle on ne peut être indifférente.

Guider les pèlerins dans le Tombeau du Juste

Le lieu est magnifique, inédit, si simple et pourtant plein de mystère. Est-ce vraiment le Tombeau de Saint Joseph et la Maison de la Sainte Famille ? Chaque sœur de la congrégation a sa manière de décrire ce trésor, et d’emmener le pèlerin au travers de ces fouilles. Petit à petit Jeanne et moi avons trouvé la nôtre ; le message que nous voulions faire passer, l’impression que nous voulions qu’ils gardent d’un tel endroit… Alors on oublie que l’on a 22 ans, et que du haut de nos 1m60 on s’adresse dans une langue étrangère à des groupes de pèlerins constitués de beaucoup de prêtres, séminaristes ou évêques, etc.

Nulle part ailleurs que dans ce lieu, je ne pourrais parler de la beauté de la vie de Jésus à Nazareth avec autant de conviction et de sourire. Mais ici on oublie le monde extérieur, on se concentre sur les 30 paires d’yeux qui nous regardent, pour leur faire partager un peu du mystère de Nazareth. On se doit de leur faire partager un peu de cette énergie qui nous porte chaque jour. Et quelle joie quand nous réussissons ! Quelle joie quand on les sent s’imprégner de ce lieu ! Chaque pèlerin a sa manière d’exprimer son ressenti : certains prient, certains chantent, certains repartent avec des petites pierres dans leur poche, d’autres versent des larmes, et les derniers n’osent plus parler. Nous partageons ce moment, tous autour du Tombeau du Juste, que nous soyons catholiques, protestants, anglicans, méthodistes, orthodoxes, etc. la différence ne compte plus.

L’expérience inédite de vivre dans un couvent

Ces deux mois, dans un couvent avec des sœurs âgées c’est une école de vie. On apprend à prendre le temps de faire les choses : de lire, d’écrire, d’échanger. On quitte son rythme de parisien pressé, et on se force à se poser. Alors on redécouvre le goût de s’adonner à une tâche sans penser à la suivante, le goût de parler à quelqu’un sans penser à une autre conversation qu’on aurait pu avoir. On se rend compte qu’il y a un temps pour tout, et qu’il suffit de savoir le prendre.
Ainsi je garde une image magnifique de ce couvent, ce havre de paix dans lequel j’ai redécouvert les petites joies du quotidien, la tête pleine de questions et réflexions. Mais ce qui m’a le plus touché c’est que tous ceux qui y entraient ressentaient aussi cet apaisement ambiant. Les sœurs savent faire partager ce modèle de vie qu’elles ont reçu, rendant ce lieu simple et chaleureux. Tout le monde s’y sent accueilli : touristes, religieux, pèlerins de toutes confessions. À leur manière elles ont été pour moi un exemple de vie dans l’unité des chrétiens : en accueillant le visiteur à la porte sans se soucier de sa différence, en ouvrant leur chapelle aux anglicans, en s’attachant à ne regarder que ce qui nous unit. Leur message est fort : repartir aux bases de la Bible, sur les pas de Jésus, laissant les différents rites au second plan, seulement comme expression d’une riche diversité au sein de cette unité.

C’est donc forte d’une expérience qui m’a ouvert les yeux sur Israël, la Terre Sainte, le rôle du Chrétien en Terre Sainte et dans l’unité de l’Eglise, que je rentre terminer ma dernière année d’études ; en espérant garder toujours en moi cette énergie de Nazareth.

Au sommaire du n° 798 de la revue plus que centenaire de L’Œuvre d’Orient

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Grand angle : Ninive, berceau du christianisme en Mésopotamie, est une de ses plus anciennes cités. Son nom signifie poisson en sumérien, rappelant le mythe de Jonas. Il apparait 34 fois dans la Bible.

L’histoire mais aussi un état des lieux, patrimonial et humain, de cette plaine de Ninive après Daech : le difficile retour des chrétiens.

« Les conditions de la paix au Proche-Orient » est le thème de notre Décryptage. En décembre dernier, religieux, hommes politiques, philosophes avaient planché sur la question au Sénat. Nous en avons retenu l’essentiel. Le patriarche irakien Louis Sako et le père Ziad Hilal, jésuite syrien, apportent leur point de vue.

Dans Question d’histoire, vous apprendrez que les chrétiens d’Orient contribuèrent largement à la naissance et au déploiement de ce grand mouvement réformateur du monde arabe au 19e siècle appelé Nahda : « Les chrétiens d’Orient, âmes de la renaissance arabe ».

Vos dons en actions : Vincent, jeune séminariste du diocèse de Perpignan en mission de volontariat d’un an, témoigne : « Vivre ensemble en Terre Sainte, c’est possible ».

Au Liban l’association Beit el Nour s’occupe de la jeunesse blessée, dans les camps palestiniens ou réfugiée de Syrie, ainsi que des prisonnières. Faîtes connaissance avec Sœur Arousiag, mondialement connue par ses nombreuses initiatives pour les jeunes de son pays, l’Arménie.

Vie des Églises d’Orient : Le Pape a le souci des chrétiens d’Orient, il le dit au corps diplomatique reçu au Vatican ; hommage au prêtre arménien assassiné en Syrie. Un évêque gréco-catholique d’Ukraine nous interpelle : de l’Holodomor à la situation actuelle, n’oubliez pas les Ukrainiens. Que savons-nous de l’œcuménisme en Europe centrale et orientale ? La période communiste fut propice à ce qu’on appela l’ « œcuménisme du goulag », mais la chute du Rideau de Fer entraina une crise profonde entre les différentes Églises. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Retrouvez le Lexique qui donne le sens de termes spécifiques employés dans les articles et l’agenda des rendez-vous culturels et médias…

 Le Bulletin de l’Œuvre d’Orient est une véritable mémoire de l’histoire des Chrétiens d’Orient. D’abord publiée sous le nom de Bulletin de l’Œuvre des Écoles d’Orient, la revue devient Bulletin de l’Œuvre d’Orient en 1930. Une grande partie des numéros sont consultables sur notre site grâce à gallica.bnf.fr. 


Infos pratiques

Directeur de la publication : Mgr Pascal Gollnisch

Rédactrice en chef : Catherine Baumont

Revue trimestrielle – Parution : décembre, février, mai, septembre. 68 pages – Format A5

Diffusion : 55 000 ex Disponible sur abonnement : 8 € pour 4 numéros/an + une version numérique offerte.

Abonnement : Œuvre d’Orient Abt – 20 rue du Regard 75006 Paris ou oeuvre-orient.fr